Souvenez-vous, à sa sortie le jeu avait pas mal fait jaser. Entre des débats sur les designs de personnages féminins dans les jeux japonais ou encore sa qualité graphique déplorable en portable, tout ce brouaha avait suffit à reporter mon départ en Alrest. Puis vous savez ce que c’est… On met un jeu de coté et le rythme effréné des sorties le noie dans la masse… longtemps. 6 ans plus tard j’ai décidé qu’il était temps de combler ce manquement culturel afin d’avoir la vue d’ensemble (hors extension) de la saga puisque Xenoblade 2 est le seul que je n’ai pas fait. Au risque de faire doublon avec ma critique de Xenoblade 3, je rappelle que j’ai découvert la saga avec le 1 sur 3DS en 2015, puis le X sur Wii U la même année, j’ai refait le 1 sur Switch via son remastered en 2020. Enfin j’ai fait le 3 l’année dernière durant l’été et j’avais été plutôt déçu…
ENCORE UN HEROS EN SHORT
Rex a un nom de chien. Mais c’est un détail car Rex est avant tout notre héros. Un gamin niaiseux en short auquel il va vous falloir vous identifier (l’avantage de le faire en été c’est que pour le short au moins, c’est plus simple de s’identifier). Il vit sur le dos d’une créature prénommée Papy car… c’est une vieille créature (un choix de nom digne de Kojima n’est ce pas ?). Tout autour d’eux, une mer de nuages laissant apercevoir au loin l’arbre monde. Rex est récupérateur, c'est-à-dire qu’il plonge dans la mer de nuages afin de récupérer des vestiges de l’ancien monde et les revendre à Argentum, la cité commerciale la plus proche. C’est au détour d’un passage dans cette même cité afin d’échanger ses trouvailles que va lui être proposée une mission des plus lucrative pour un groupe au premier abord plutôt étrange et taciturne. Cette mission s’avérera être plus que ce qu’elle semblait et aboutira sur la découverte d’une étrange jeune fille : Pyra (La fameuse héroïne aux gros seins responsable du débat qui a accompagné le jeu au sujet de la sexualisation des héroïnes japonaise). Une entrée en matière qui soulève tout un tas de questions. La quête de réponses va passer par une aventure ayant, comme pour la série entière, l’exploration comme maitre mot. Avant tout cela, il me parait primordial de vous introduire (n’y pensez pas je vous en supplie, disons initier) à un concept majeur du jeu : Les « Lames ».
Dans le monde de Xenoblade Chronicles 2, existe des personnes ayant la faculté d’éveiller des « Lames » à partir de cristaux-coeur. Les Lames sont des personnages alliés-soutiens que l’on pourra équiper jusqu’au nombre de 3 par personnage à terme. Ils ont plusieurs formes : humaines, animales, monstrueuses etc. Ils sont associés et liés à la personne les ayant éveillés. Les personnes ayant la faculté d’éveiller ces Lames sont appelées des « Pilotes ». Ceci est leur histoire (toudoum).
LES BATISSEURS DE MONDES
S’il y a bien quelque chose qui résume la saga Xenoblade ce sont ses panoramas (entre autre). Partagés entre gigantisme, verticalité et direction artistique enchanteresse, ils sont une invitation constante à la flânerie. Pas étonnant de retrouver cet esprit dans le diptyque Zelda BOTW et TOTK quand on sait qu’environ 50% des effectifs de Monolith Software ont bossés sur la map d’Hyrule. Une science de l’architecture, de la topographie que l’on ne retrouve presque nulle part ailleurs et qui se veut centrale dans ce que propose un Xenoblade. On arpente ces terres en ramassant toutes sortes d’éléments (bois, insectes, fruits, fleurs, poissons etc…) tout en croisant des créatures diverses et variées. Comme le veut la tradition on retrouve alors ces ennemis uniques (ayant un prénom + un adjectif tel que « Gonzales l’Immuable » ou encore « Melvin l'équinoxial »), ils sont plus costauds, donnent plus d’XP, un loot rare éventuel etc…
L’exploration est donc une part importante dans l’adn de la saga. Un des points singulier que l’on ne retrouve que dans cet épisode néanmoins est la possibilité d’interagir avec le décor via des compétences passives de nos Lames. Par exemple plonger en profondeur à un point précis demandera une Lame d’eau niveau 3 + la « compétence de terrain » courage niveau 2. Faute de quoi l’accès vous serra refusé et il faudra y revenir plus tard. Certains points de ramassages de loot seront favorisés par des talents également. Botanique vous permet de ramasser plus de fleurs etc… Dans le fond ce système de m’a pas déplu mais ce qui est problématique vient de la façon dont s’obtienne les Lames.
Pour en acquérir de nouvelles, il faut utiliser des « cristaux-cœur ». On les obtient naturellement en tuant des ennemis, mais battre des ennemis rares augmente les chances d’avoir des cristaux de meilleure qualité. Il y a les cristaux cœur communs, rares et légendaires. Il existe toutes sortes de Lames qui sont classées par rareté de 1 à 5 étoiles. Les lames 5 étoiles sont uniques avec un design unique également (leur design a d’ailleurs été confié à tout un tas de chara-designer afin d’en avoir une belle variété… et inégalité niveau résultat). Puis il en existe toute une palanquée au design similaire et basique se partageant le classement de 1 à 4 étoiles. L’obtention repose donc sur le hasard pur, le gatcha comme on l’appelle au japon. Une roulette sur laquelle il est impossible d’influer, le jeu sauvegardant à chaque tirage. Je pense même que plus on obtient des lames rares, plus il est difficile d’avoir celles qui nous manque (Pour ma partie, il m’en manque 5 mais après 120 essais infructueux j’ai abandonné).
L’autre problème c’est qu’à quelques reprises l’avancée du scénario principal est conditionnée par ces compétences passives. Alors quand on n’a pas eu de chance au tirage, hormis farmer pour débloquer une lame ayant la bonne compétence de terrain… Pas d’autres choix. Pour ma part le problème s’est surtout posé dans les premiers chapitres où j’avais les bonnes compétences mais pas au niveau requis. Ce qui demande de remplir des conditions propres et différentes à chaque lame pour les améliorer. Ce que le jeu ne vous dit à aucun moment c’est que les niveaux sont CUMULABLES ! Si un passage vous demande d’avoir la compétence « détente » niveau 3 pour sauter au dessus d’un obstacle, avoir une lame avec cette comp niveau 2 et une autre lame avec cette comp niveau 1 marche aussi ! J’ai compris ça après de nombreuses heures, une fois encore un tutoriel clair n’aurait pas été de refus. Des coffres qui exigent la compétence crochetage, des obstacles demandant des compétences élémentaires, bref vous voyez le tableau. Alors je le répète je n’ai personnellement pas détesté cette idée de game design, c’est plutot son conditionnement au hasard couplé à un manque d’infos qui peut le rendre un peu plus laborieux. Je dois bien reconnaitre qu’ayant investi dans le season pass, j’ai pu commencer l’aventure avec un stock non négligeable de cristaux cœur. J’avais néanmoins gardé les cristaux cœur légendaires « au cas ou », je me rend maintenant compte que j’aurai du les claquer des le départ…
Avec ce système vous allez naturellement vous retrouver avec tout un stock de Lames inutiles. Heureusement le jeu va intégrer à un certain stade de l’histoire une fonction qui va leur donner une utilité. Le mercenariat. Via un énième menu vous allez pouvoir envoyer vos lames en missions pour qu’elles glanent or, exp et points de compétences. Ces missions sont assignés aux différentes régions du jeu et participent à augmenter votre lien avec le peuple qui les habitent. Certaines d’entre elles peuvent même permettre d’avancer dans les quêtes annexes ou approvisionner de nouveaux objets dans les différentes boutiques. Il me parait assez important de s’investir dans cette part du jeu car elle est réellement rentable. Vous envoyez quelques Lames pour une durée déterminée par la difficulté de la mission, 30mn, 50mn, 90mn (temps de jeu ingame)… Et elles reviennent avec de nouvelles récompenses et généralement avec un arbre de compétence qui s’est amélioré. C’est tout benef comme on dit.
Quitte a évoquer le système de développement des régions, je vais le détailler un peu ici. Comme dans les autres épisodes vous pouvez améliorer votre entente avec chaque région du monde. Pour cela vous pouvez effectuer des quêtes annexes, dépenser de l’argent ou faire de la récupération (meilleure option). La récupération consiste à plonger à certains endroits afin de trouver des objets que l’on revend dans les villes. Un mini jeu avec un QTE à faire. Rien de passionnant mais ça se fait relativement rapidement. Il faut préalablement investir dans des cylindres mais on est rapidement remboursés de nos efforts alors ne vous privez pas. Améliorer l’entente dans les villes ouvre d’autres quêtes annexes, et approvisionnent les magasins en nouveaux objets. Ce qui est intéressant c’est qu’en achetant un exemplaire de chaque objet d’une boutique vous pouvez racheter le magasin ce qui confère un effet passif (se déplacer 5% plus vite, gagner 10% d’XP supplémentaire, attirer le loot de plus loin etc…). Encore un sous-système qu’il est bon de ne pas délaisser puisque le jeu en vaut la chandelle.
(NOT) EASY TO LEARN, HARD TO MASTER
Le système de combat s’est bien épaissi depuis le premier Xenoblade. Avoir fait le 3 avant le 2 (ne me jugez pas) m’a pleinement permis de prendre conscience que beaucoup de choses étaient arrivées avec le 2. Le système de base est identique à avant. On positionne nos personnages devant un ennemis et ils attaquent automatiquement. Ces auto-attaques (faibles) remplissent les jauges de nos Arts (des techniques spéciales) qui une fois pleine peuvent être déclenchées. Elles sont souvent soumises à conditions pour maximiser leur efficacité. Par exemple certains Arts occasionnent plus de dégâts sur le flanc de l’ennemi ou derrière lui. D’autres ont des effets passifs ou des effets que l’on applique aux ennemis. Comme dans le premier opus on retrouve ainsi l’enchainement : Déstabiliser => Chute => Ejection => Commotion. Derrière cet enchainement aux termes barbares nous avons l’exemple de certains effets. La chute met l’ennemi à terre l’empêchant d’attaquer quelques courtes secondes. Si l’on arrive à aller jusqu’à la commotion ce sont de gros dégâts qui seront appliqués.
Chaque personnage pouvant avoir 3 Lames, chacune ayant ses propres 3 arts et c’est donc un total de 27 techniques que l’on peut lancer dans un combat. Tout l’intérêt est donc dans la construction de nos possibilités de combos car si vous ne l’aviez pas encore compris Xenoblade Chronicles 2 est un jeu à systèmes. Il faut aimer aller dans des menus et bricoler ses stats, essayer des choses… car les menus vous allez les bouffer des heures et des heures sur votre partie. On est clairement sur un J-RPG pointu qui vous donnera des tutoriels jusqu’aux toutes dernières heures de l’aventure. Les nouvelles mécaniques s’ajoutent et s’imbriquent sans cesse venant épaissir toujours plus le gameplay. Il est d’autant plus surprenant de voir certaines critiques taxer le jeu d’avoir un système de combat dans lequel il suffit de poser la manette. On peut faire pas mal de reproches au jeu mais celui-ci est certainement l’argument de la mauvaise foi.
Attendez vous croyez que c’était tout ? A cela s’ajoute aussi les combos élémentaires. Chaque lame est associée à un élément et possède en plus de ses 3 arts de base, un 4éme arts spécial qui augmente lorsque l’on utilise l’un des 3 arts de base. Sa particularité c’est qu’il peut aller jusqu’au niveau 3 si vous patientez assez longtemps avant de le déclencher. Le but ici, va être de faire des « routes élémentaires ». Un exemple valant mieux que 1000 mots allons-y : Vous enclenchez votre Art spécial de niveau 1 élément feu. Un tableau va apparaitre en haut à droite de l’écran pour vous indiquer avec quels autres éléments vous pouvez enchainer votre combo. En l’occurrence ici c’est soit à nouveau feu, soit eau. Il vous faut donc cette fois placer un art spécial de niveau 2 d’un de ces éléments. Enfin si vous faites de même au niveau 3 vous placez un orbe élémentaire sur l’ennemi du même élément que ce même art spécial de niveau 3. Cette orbe gravite autour de l’ennemi et l’idéal est d’en placer plusieurs (sur les gros ennemis ayant beaucoup de PV).
Une fois cela fait et si votre jauge d’entente est pleine (une jauge qui augmente à force frapper les ennemis et de leur infliger des malus), vous pouvez enclencher des combos dévastateurs. Durant ceux-ci vos personnages vont à tour de rôle attaquer l’ennemi, vous n’avez qu’à choisir laquelle des 3 lames interviendra, l’idéal étant d’utiliser des lames dont l’élément est contraire aux orbes que vous avez placés sur les ennemis. Si vous y parvenez l’orbe éclate et vous donne un nouveau tour de bastonnade supplémentaire. Sachant que chaque personnage qui attaque démultiplie un coefficient qui fait exploser les dégâts (on peut aller au delà des 1000% de dégâts supplémentaires !), autant vous dire que maitriser tous les systèmes est un véritable plaisir pour des résultats ahurissants.
Je m’arrête la mais il y a encore bien d’autres choses avec par exemple des transformations qui demandent des pré-requis afin d’aller encore plus loin dans les combos dévastateurs. Je ne vais pas y aller par quatre chemins, le système de combat de Xenoblade Chronicles 2 est non seulement le meilleur de la série mais aussi un des tout meilleurs systèmes que j’ai pu voir dans un JRPG. Il y une vraie différence entre les combats qui semblent interminables quand on ne connait / maitrise pas encore chaque recoin des mécaniques et les combats quand on a quelques dizaines d’heures de jeu dans les doigts.
J’ai bien conscience qu’à l’écrit et en dépit de mes efforts pour expliciter tout cela, l’ensemble puisse paraitre incompréhensible. Rassurez-vous, en jeu on finit par tout assimiler si on s’y investit un peu.
Ce qui obscurcit le tableau par contre c’est que pas mal de choses ne sont pas ou pas assez bien expliquée dans Xenoblade 2 et c’est quelque chose que l’on va retrouver sur pas mal d’autres points…
SACRIFIE SUR L’AUTEL DE LA NIAISERIE
Nous entrons dans ce qui est pour moi, LE principal problème de la saga Xenoblade Chronicles. Sa narration. Sur le fond c’est une série qui soulève pourtant des questionnements intéressants, d’un niveau plus élevé que d’autres JRPG même. Mais le traitement qui leur est fait est déplorable. Combien de scènes kikoo-shonen avec des héros qui chialent en tapant contre le sol pour UNE phrase pertinente dans un dialogue ? Combien de traits d’humour ultra-cringe, de personnages qui rigolent comme des mongolos pour UNE scène touchante ? Combien de pouvoirs de l’amitié, d’amourettes pudiques de gamins, de fucking Nopons qui parlent comme des Teletubbies pour UN questionnement existentiel qui mériterait qu’on mette sur pause pour y réfléchir 2 minutes ? Pour moi narrativement toute la saga Xenoblade est un gâchis. C’est un Tetsuya Takahashi contraint de noyer les questions qui le hantent depuis toujours sous des tartines de clichés japanim parce qu’il faut que ça marche commercialement. Et merde ça fait mal, quand tu vois à quel point tous les systèmes s’imbriquent, que ça marche quand même super bien, que ce sont littéralement des mondes gigantesques dans le creux de nos mains... A la limite je trouve que le 2 pose ses enjeux rapidement, ne répond qu’à la toute fin et fout des péripéties un peu nulles aux milieux pour remplir. Mais ça reste moins pire que la soupe 1er degrés du 3 que j’ai trouvé à vomir avec ses tunnels de dialogues pour ne rien dire et son rythme éclaté… (Toujours narrativement j’entends). Rien à faire, ça ne marche pas sur moi.
Tout n’est pas à jeter cependant. Le 2 a, à sa décharge, une team vraiment attachante. La fin procure ce petit truc de quitter un jeu auquel on s’est vraiment attaché. Et c’est le principal. Je ne peux pas impacter sur ma note ces reproches sur la narration car c’est vraiment personnel. Les gens qui aiment les héros qui gueulent le nom de leur super technique et les personnages qui changent de couleurs de cheveux à chaque transformation y trouveront surement leur compte. Il y a un public pour ça et vous avez bien raison, kiffez. Un mot sur la musique tout de même, toujours au sommet avec nombres de mélodies marquantes. C'est toujours un succès pour les Xenoblade avec notamment un Yasunari Mitsuda qui nous retourne le cœur.
LE VILAIN PETIT CANARD ? VRAIMENT ?
Synthétisons ce joyeux bordel que j’ai l’outrecuidance d’appeler « critique ». Xenoblade Chronicles 2 est un jeu bourré de qualités, je reste stupéfait de voir comme tout s’emboite et se complète entre ce que l’on nous raconte et ce que l’on nous fait faire. L’aventure se veut moins indigeste que son successeur mais moins bien rythmé que son prédécesseur. C’est aussi le moins accueillant de la saga avec un démarrage assez lourd et surtout un manque d’explications pénalisant. Il fait vraiment parti de ces jeux qui demandent un investissement certains, qui se « méritent ». En terme de temps déjà car 99 heures il faut réussir à les caser quelque part et ce n’est pas toujours compatible avec une vie de trentenaire à mi chemin vers la quarantaine. C’est également un investissement mental car il demande un apprentissage sur le tas et par le temps. Son système de combat est hyper pointu mais aussi très gratifiant. La lourdeur on la retrouve notamment en termes d’interface, avec des menus partout à surveiller sans cesse et à jongler dans les différents onglets. Sur ce point le 3éme avait vraiment amélioré la quality of life c’est indéniable.
Enfin c’est surtout un jeu avec du cœur, qui a été fait avec une réelle envie d’en donner beaucoup aux joueurs. Et c’est absolument palpable. J’en ressors assez éreinté mais agréablement surpris. 6 ans plus tard et un Xeno 3 dans les doigts n’y auront rien changé. Malgré les écueils techniques, l’aléatoire, les nichons énormes, la niaiserie qui me hérisse tant le poil, les nopons de l’enfer et l’interface lourde j’ai aimé. Beaucoup. C’était le Xeno de l’été.
Vivement l’été prochain pour empiler les extensions du 2 et du 3...