Chaque situation un album

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Un album du père.

Mon père jouait souvent - aujourd'hui moins - le magnifique air au piano de la chanson le Parc Montsouris. Une mélodie mélancolique, qu'il interprétait souvent le dimanche en famille, les rares fois où il était avec nous et qui annonçait déjà la reprise de la semaine et son départ prochain. Parfois il était encore plus triste et jouait du William Sheller (J'en ai avais envie aussi). Et lorsqu'il était plus gai, c'était Claude Nougaro (Tu verras). J'ai toujours cherché dans ces chansons une réponse à mes questions de petit garçon, que voulait me dire mon père, fourbu par une semaine de travail, à travers ces notes ?

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Un album de la mère.

Ma mère est une inconditionnelle de ce chanteur. Je la comprends. Elle a eu toujours le goût musical affûté, comme mon père, quoique ma mère n'aime pas les choses très expérimentales. Elle aime aussi Christophe, The Cranberries, Laurent Voulzy...

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Un album du frère.

Suivant les pas de mon père au piano, mon frère a suivi une évolution musicale, commençant par la Sonate au clair de Lune et Michel Berger, puis Chopin et Rachmaninov, avant de déboucher sur l'improvisation jazz et Pettruciani. Il a remonté, avec ses doigts habiles deux cents ans de piano.

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Un album du second frère.

The Great Gig in the Sky est son leitmotiv absolu, ressassé dans tous les sens. A la guitare, il est Wish you were here. C'est aussi un concert partagé avec un Roger Waters vieillissant qui nous a offert cet album en live, bouclant la boucle de notre périple musical commun.

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Le premier album.

Au sens premier du terme, chanté, interprété, enregistré. Je me souviens encore enfant de la fierté d 'achever ce difficile Pie Jesu qui poussait le souffle à bout, entre voix de tête et de poitrine. Ce morceau, tant et tant chanté, d'un coin à l'autre de la France, dans l'immensité de cathédrales et même de centres des congrès. On me promenait un peu comme un singe savant, bien que mon talent fut modeste. L'album, confidentiel, sans importance, existe apparement sur Amazon. C'est une sensation étrange, que d'avoir un fragment de soi sur une galette.

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Un album d'adolescence.

Il s'agit très certainement de mes premiers concerts de bonhomme, stade de France, 2007. Enorme foule, groupies hystériques. Muse est un groupe de rock adolescent, facile d'accès, qui ouvre toute la voix du rock avec lui.

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Un album pour rêver.

Mettre cet album en train, dans le bus, dans la forêt, en flânerie, n'importe quand, et tout de suite vous vous détacherez du monde, pour entrer dans la rêverie mélancolique et la contemplation lascive. Cet album est un rayon de soleil au milieu d'un ciel mouillé.

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Un album de vacances.

Album que ma mère mettait sur la route des vacances. Je me rappelle précisément de Quatre Nuage et d'Avril, alors que nous étions quelque part en Dordogne ou vers Angoulème, sur une petite départementale, champ de blé épanoui, ciel d'un bleu absolu, et le sentiment de légèreté flottante, celui des vacances et du bonheur familial.

Il faut ajouter de Voulzy, "le rêve du pêcheur", un morceau qui me plonge immédiatement en vacances, qui en est le prolongement.

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Un album pour danser.

Ma mère le mettait aussi beaucoup dans la voiture ou à la maison, pour se motiver. World Hold On est un morceau immédiatement entrainant, joyeux, très festif et estival mais avec une touche de mélancolie sincère et qui fait que l'on plane autant que l'on danse.

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Un album pour réfléchir.

Album découvert assez tard, mais artiste très apprécié de la famille, par mon père en particulier qui l'écoutait parfois. Tous les textes sont d'une grande profondeur, mélangeant politique, érotisme, poésie pure, servi par des mélodies symphoniques.

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Un album à écouter dans la nature.

Cet album est une pure invitation aux grands espaces. Immédiatement il transporte dans les vastes plaines d'Amérique, il livre des paysages grandioses, des forêts immenses, des sommets enneigés, des falaises grandiloquentes. Il exprime aussi la dureté, l'aridité, la dangerosité d'une nature hostile qui juste après un virage vous apaise par le panorama sublime qu'elle vous offre.

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Un album pour l'été.

Cet album est un concentré de mélancolie chaleureuse, Trouble en premier lieu.

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Un album pour l'hiver.

Philip Glass est le compositeur de l'hiver, avec sa musique itérative, son piano mélancolique (pianiste très impressionnant en concert quoique vieillissant). J'ai écouté tant et tant cet album, lorsque j'avais froid, lorsqu'il pleuvait, lorsque j'étais triste, jusqu'à ce qu'il épouse parfaitement mes sentiments et alors, les notes coïncidant avec mon état d'esprit, j'y trouvais ce qu'on peut appeler un véritable plaisir esthétique.

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Un album pour planer.

L'album électro très abouti, qui pose des ambiances incroyables sur chaque titre, qui te fait passer par tous les états, mélancolies, danse, joie, tristesse. Le son léché de la French Touch.

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Un album pour se droguer.

Pas besoin de prendre un joint. Mettre son casque, lancer Shine on you Crazy Diamond, et prendre son pied. Le trip est bien long en plus, près de vingt cinq minutes le morceau. Une came pas chère.

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Un album pour déprimer (mais déprimer dans la beauté)

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Un album grandiose (ou badass) - énorme gageure, énorme son.

Badass, parce que c'est 4h de musique non stop, énorme symphonie étirée d'une manière virtuose, jusqu'à épuiser musiciens et auditeurs. Tout y passe, toutes les émotions, toute la puissance orchestrale, cors, violons, choeurs et tant et tant. C'est tellement abouti.

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Le dernier album - et aussi le premier. La boucle est bouclée.

Cet album est l'un des plus importants de ma vie, découvert au collège, révélation absolu. Je me mis à croire, à prier, pleurer sur chaque note que je connais encore pieusement, dans le moindre détail. J'avais acheté la partition orchestrale, cherchant à comprendre le grand mystère de ces notes absolues, mais je restais de marbre face à cette langue que je ne maitrisais pas assez, un peu comme le latiniste débutant qui butte sur les déclinaisons, j'étais un jeune musicien qui connaissait assez mal ses gammes. Mais toujours je reviens au Requiem, pour me bercer de sa profondeur infinie, de sa noirceur terrible, de sa beauté divine. Lorsque ma mère m'emmena à un concert où il était interprété, j'ai jubilé, bien entendu.