Promenons-nous dans les bois...
On rapproche beaucoup (à l'excès selon moi) cet exemplaire de teen-lit du Twilight de S. Meyer ce qui, à mon sens, n'est pas vraiment pertinent. Si, effectivement, la sortie du livre et son attrait ont surfé sur le succès en boutique de Twilight, Frisson (Shiver en V.O.) n'a pas grand chose à voir avec celui-ci. Si Maggie Stiefvater se réapproprie elle aussi le modèle du garou en le modernisant considérablement et en le déclinant comme une romance impossible (genre très prisé par les auteurs de teen-lit), elle le fait avec un tout petit peu plus de bonheur que Meyer, du moins, dans son ensemble.
J'avoue avoir entamé ce livre à trois reprises. Commandé il y a quelques années, il a pris la poussière pendant un moment sur une étagère avant que je ne daigne lui accorder un peu d'intérêt. Mais la troisième tentative fut la bonne et, sans parler d'un page-turner, Frisson se lit vite et plutôt bien. Le premier bon point à la galerie de ses personnages, plutôt bien dessinés s'agissant des adolescents, avec plus ou moins d'attention il est vrai (à cet égard, le personnage de Sam se révèle passionnant, quand celui de Grace, plus pragmatique, trouve son intérêt dans sa force de caractère), avec des seconds couteaux qui s'avèrent délectables en fin de récit. Un bon point aussi concernant non pas l'intrigue, plutôt simplette, mais le traitement de celle-ci, au gré des changements de températures, déchiffrant émotions et souvenirs tel un puzzle globalement savoureux. De jolis passages, très poétiques, avec de belles envolées, qui concurrencent quelques chapitres plus gauches, et quelques moments insipides. Pas de la grande littérature, donc, mais un style pas désagréable, avec de jolies références. On sent chez l'auteure un amour des livres pressant.
Les bémols, non négligeables, qui varieront très certainement selon le public en présence du bouquin : l'incrédibilité de certains passages, qui sont légions, comme la déclaration presque honteuse d'une impuissance à faire coller le réel à la fiction, en mode "ça, c'est fait" ou "hop! ça passe". La sphère adulte, à une exception près (Beck), démissionnaire en tous points, factice, obsolète, complètement satellite. Dés lors, il est aisé de laisser ces ados en plein péril jeune aller et venir à leur guise, dormir chez les uns et les autres (ou dans le lit des autres) en toute liberté, sans réel souci de vraisemblance (l'effraction à la clinique est un bel exemple de portnawak). Un défaut de cohérence qui plombe un peu l'intrigue, cantonnée alors à une romance teenage aux relents parfois un peu mièvres.
Et un peu de perplexité quant à la fin qui, si elle met un coup d'accélérateur s'agissant de l'action, s'empêtre dans son propre rythme, comme emportée dans son élan, pour finalement se prendre le mur d'une conclusion qui ne laisse que peu d'ouverture, a priori, à une suite. Ou, à tout le moins, ne la rend-t-elle pas indispensable.
De la teen-lit d'honnête facture, dans la moitié supérieure du classement en tous cas, qui se lit sans prise de tête, ni sans intérêt excessif.