La décadence a bercé nos corps blasés et nos âmes égarées (qui se sont bien gaussées)
J'aime beaucoup Will Cuppy. Et pas seulement parce que ce type vivait isolé dans une cabane qui prenait l'eau l'hiver et y dormant avec ses légumes pour les empêcher de geler.
Bien que l'on aimerait quelqu'un pour moins que ça.
Will Cuppy est drôle, très, et érudit p't'être encore plus, à moins que ce ne soit l'inverse.
Découvert avec son "Comment attirer le wombat ?", le mot "wombat" figurant dans un titre d'oeuvre faisant partie de mes critères principaux pour acheter un livre, je n'eus de cesse de l'apprécier un peu plus à chaque bouquin dévoré. Il y en a d'ailleurs trop peu et encore moins de traduits en français.
Vous me direz c'est surement moins grave que de se réveiller nez à nez avec une aubergine, mais quand même.
Comment décrire "Grandeur et décadence d'un peu tout le monde" ?
Si vous vous êtes jamais posé la question de savoir si Catherine II de Russie avait réellement la cuisse aussi légère que l'histoire le laisse croire, si Néron n'avait pas un bon fond, peut-être, ou encore si l'herbe ne repoussait vraiment pas après le passage d'Attila, alors ce livre est fait pour vous.
Pour les autres, il peut toujours être appréciable, dans de courts et hilarants chapitres, d'en apprendre un peu plus sur Périclès, Pierre le Grand, Lucrèce Borgia ou Erik le Rouge. Le pire étant que toutes ces anecdotes farfelues sont plus que véridiques, Cuppy étant reconnu pour sa boulimie de connaissances sur un sujet qu'il souhaitait aborder dans l'un des ses livres / articles. En gros il lisait tout ce qui se rapprochait de près ou de loin sur le sujet, en faisait un nombre incalculable de fiches et au final accouchait d'un article de, grand maximum, quelques pages.
Et croulait donc sous la paperasse surement. Mais entre temps il avait emménagé, contraint et forcé, dans un appartement à Manhattan duquel il ne sortait presque plus, tout ce bazar ne prenait donc fort heureusement pas la pluie. L'histoire ne dit pas s'il continuait de dormir avec navets et compagnie.
Ceci est une oeuvre posthume. Will Cuppy y travailla pendant des années, modifiant, peaufinant, jamais satisfait totalement de ce qui peut être perçu comme son oeuvre la plus riche.
Quelques passages avaient alors déjà été publiés dans des journaux pour lesquels il travaillait. Articles dans lesquels Cuppy, lorsqu'il les envoyait aux rédacteurs, n'oubliait jamais d'ajouter en marge quelques commentaires sur ses neuf enfants imaginaires à nourrir ou encore sur ses pulsions suicidaires qui seraient fort apaisées par une publication.
Que voulez-vous, il faut savoir se vendre !
Œuvre non achevée donc, notre gaillard se suicidant aux somnifères à l'âge de 65 ans, sa dépression refusant de lui ficher la paix.
Et pire que tout, il était dans l'obligation de déménager, forcé une nouvelle fois. C'en fut trop et il fit ses valises pour de bon.
Sa nécrologie parue le lendemain de sa mort fut à l'image de sa vie : le journaliste se trompa de photo pour accompagner son article et mit celle de quelqu'un d'autre.
Sûre que notre drôle de zigue aurait adoré.