Avec le succès planétaire de la série TV Sherlock, qui a propulsé au rang d'icônes des acteurs comme Martin Freeman et Benedict Cumberbatch, il n'est pas étonnant d'avoir enfin vu arriver en France la traduction des aventures de Lucifer Box de Mark Gatiss. Il est un peu plus étonnant , par contre, de voir le livre vendu comme étant celui de « l'acteur qui joue Mycroft dans la série » (ce qui est vrai), au lieu de tout simplement préciser qu'il est surtout le co-créateur de la dite série et un scénariste de talent très actif. Je dois avouer rester dubitative devant un tel choix marketing, le métier de scénariste me semblant plus proche de celui d'écrivain que le métier d'acteur, mais bon, passons...
Bref, que nous propose le Club Vesuvius? Lucifer Box, notre héros agent secret pour le compte de Sa Majesté, nous narre ici ses aventures à Naples, qui débutent par une enquête portant sur les morts étranges d'éminents scientifiques. L'intrigue se passe au début d'un Xxème siècle teinté de quelques références Steampunk (mais discrètes), et le tout se lit assez rapidement.
Sur un point purement matériel, je suis assez déçue de l'édition proposée par Bragelonne . La couverture est très classe, certes, mais elle n'est absolument pas accordée au style des illustrations qu'on peut trouver à l'intérieur du livre, et semble donc totalement hors sujet. Elle est aussi affreusement fragile, le comble quand on sait que le livre coûte quand même 25€ pour seulement 300 pages écrites en gros caractères... au moins, la traduction proposée est correcte (même si quelques soucis de concordance des temps sont à souligner), ce qui marque une sacrée amélioration si on compare à la catastrophe ambulante qu'est « La Moisson du Temps » (du même éditeur).
Quant à l'histoire... si vous connaissez bien l'univers de Gatiss, vous ne serez pas dépaysé. Si le scénario ne casse pas trois pattes à un canard et demeure assez convenu en apparence, on devine rapidement qu'il est une ode aux genres que l'auteur affectionne, et qu'il pastiche partiellement deux figures bien connues de la littérature britannique à savoir Sherlock Holmes et James Bond. Gatiss s'amuse à retourner certains codes des genres pré-cités, et mine de rien ça marche franchement bien (à titre d'exemple, c'est un homme qui tient, à quelques reprises, le rôle de demoiselle en détresse / Lucifer est présenté en tant que paragon de la masculinité façon James Bond, tout en étant bisexuel etc...).
L'histoire est parsemée de petites références et de petits traits d'humour bienvenus, et met surtout en scène un héros formidable. Lucifer Box est un pervers égoïste, incapable sur les bords, très imbu de sa personne et plus occupé à mépriser le bas peuple qui l'entoure (et lui sauve souvent la mise) qu'à travailler sérieusement, mais qu'importe, il est irrésistible ! Je soupçonne une petite critique de la upper class britannique derrière, encore relativement puissante au Royaume-Uni, mais ce n'est pas assez vindicatif pour transformer le livre en autre chose qu'une simple aventure à lire rapidement avant de dormir (ce qui est tant mieux car ce n'était clairement pas l'intention de départ).
Bref, Le Club Vesuvius c'est franchement pas mal ! Ça ne va pas révolutionner le monde de la littérature, mais c'est bourré de chouettes idées sympa à découvrir et ça vous fera rire l'espace de quelques heures. Ceci étant dit, je pense qu'il parlera surtout à ceux qui connaissent déjà un peu le travail de Mark Gatiss et comprennent donc son univers. Les autres risqueront de trouver Le Club Vesuvius un peu fade, c'est là tout le risque de faire dans le second-degré assez subtil.