Alors, j'ai lu ce livre, car ma passion pour la Russie a également engendré un certain goût pour la littérature russe. Domaine que j'ai découvert il y a quelques années avec Dostoïevski que j'aime depuis à un degré assez peu convenable. Existentialiste sans le savoir (et probablement sans le vouloir), il ne pouvait que me plaire.
J'ai donc décidé de lire les 100 plus grands livres russes (selon SensCritique). J'en suis à peu près à un quart, et j'ai rarement été déçu.
Or, j'ai lu certaines œuvres de Tolstoï que je trouve nettement inférieur à Dostoïevski. Notamment en raison d'une psychologie plus "superficielle" et d'une narration plus critique (là où Dostoïevski laisse ces personnages vivre par eux-mêmes malgré des convictions différentes de l'auteur).
Néanmoins, pour ma culture, j'ai voulu lire le Anna Karénine. Au fur et à mesure de lecture, j'ai eu l'impression de lire le "Madame Bovary" russe. Lorsqu'on sait que je n'ai justement jamais voulu le lire, on doute de mon appréciation de l'œuvre...
J'ai repéré deux points forts du livre selon les gourmets. Primo, il serait un bon reflet de la vie russe noble à cette époque. A cela, je dirai que oui, puisque les autres livres russes s'alignent sur le mode de vie et de pensée écrits ici. Je n'enlève donc pas ce point fort au livre, je pense simplement que de meilleurs livres le possèdent aussi (lisez L'idiot, bordel !)
Ensuite, il est évoqué la psychologie des personnages. Mais là, je m'inscris en faux ! Les personnages sont très peu intéressants, même assez bêtes et égoïstes. Mention particulière à Anna qui m'a fait m'arracher les cheveux par son égocentrisme et son rapport toxique aux autres (le hashtag metoo contre elle, crois moi bien qu'elle le méritait). D'ailleurs, aucun personnage ne m'a plu dans le livre. Ce qui est récurrent chez Tolstoï. Il brosse bien des caractères, mais n'arrivent pas à réellement décrire des âmes sans tomber dans la caricature ou le cliché, quitte à d'ailleurs être incohérent lorsqu'ils mélangent les clichés (pour Lévine ou Anna par exemple). En effet, l'on
peut sentir qu'il a souhaité montré l'existence de personnages en recherche d'absolu (ce qui est criant à la "fin" des personnages). Mais avec regret, je me dois de souligner qu'il tombe dans l'erreur qui consiste à utiliser son personnage pour "dire ce que l'auteur veut" et non "laisser vivre ses personnages". Amenant alors à des personnages qui devraient etre frappants de force mais ne sont que des fonctions accomplies par des "hommes-machines" (aux rouages visiblement grippés au regard des incohérences).
Contrairement à d'autres auteurs russes très poignants (Dostoïevski bien sûr, mais Tourgeniev ou Gorki et Soljenitsyne pour les plus récents).
Sincèrement, j'avais trouvé Tolstoï surestimé après quelques lectures, mais c'est devenu à présent une certitude. C'est un excellent peintre qui sait décrire la vie de son époque avec un brin de psychologie (étant l'un des premiers et ayant produit des fresques, cela doit expliquer son succès), mais il ne met aucune flamme. C'est terne. Et à titre personnel, je regrette son succès qui met dans l'ombre d'autres œuvres slaves bien supérieures.