Aux confins du monde, "là ou à l'origine, il y a l'absence de tout"
Magnifique livre que nous livre ici Cécile Ladjali, aux confins du Kazakhstan, au bord de la mer d'Aral agonisante.
Alexeï et Zena s'aiment depuis l'enfance. Dans leur village de Nadezjda, ils observent la mer se retirer lentement à cause du détournement de ses affluents par les communistes. Alexeï est sourd mais un musicien hors pair. Il compose, sur son violoncelle, pour Zena, l'Aral et pour la huitième note, celle qu'il cherche à travers les vibrations de son corps...
Autour de sujets tels que la création, le silence, la solitude, la nature mais l'amour aussi, Cécile Ladjali nous embarque pour un voyage au coeur du monde, celui de l'Aral, mais aussi au sein du monde particulier d'Alexeï et de sa quête personnelle.
Le style est incroyable d'intensité, et ne s'adresse pas à tous les lecteurs. Assez exigeant en effet, il ne s'agit pas de lecture "facile", mais qui donne à réfléchir et surtout qui plonge dans une ambiance très particulière. On s'y croirait, au bord de l'Aral, à regarder la mer disparaître petit à petit, bercés par le violoncelle d'Alexeï, à la fois douce et lancinante, angoissante et apaisante, vibrante.
"Toutes les névroses, toutes les peurs, toutes les angoisses viennent de l'attente, de l'épuisement de ce travail de titan qui consiste à émettre des sons dans la béance des vides, à colorer les trous noirs de la mémoire, à inventer des dialogues, des causeries magnifiques, des chuchotements aimants, là où, à l'origine, il y a l'absence de tout."