Me voilà bien désorienté pour exprimer un avis définitif sur ce livre :
J’aime ou je n’aime pas ?
Génial ou merdique ?
Allez savoir ?
1 – Je n’ai aucune expertise littéraire pour donner un avis autre que purement subjectif.
2 – Dans le domaine de l’art – parce qu’il en est question, ici – j’ai une culture qui se limite à une vingtaine d’années de peintre amateur dans un atelier où nous avons usé successivement quatre professeurs de bonne volonté.
3 – Si j’ai lu ce livre c’est pour me reposer après une "prise de tête" monumentale sur un bouquin qui parle de planètes minuscules. Et parce qu’il y a deux ans, environ, une de mes éclaireuses l’avait lu et écrit un papier qui avait éveillé ma curiosité et mon envie. Voilà qui est fait !
4 – Et puis quand-même, même si ça n’a rien à voir, j’ai été influencé par le souvenir agréable d’un bouquin (La carte postale) écrit par la sœur de l’auteure (Anne)… une histoire de famille !
Claire Berest est née à Paris le 14 juillet 1982 – on parle beaucoup du 14 juillet, dans son bouquin… – elle est diplômée d'un Institut universitaire de formation des maîtres (IUFM), et enseigne quelque temps en ZEP avant de démissionner. Une pure coïncidence (?!) si son compagnon se prénomme Abel comme le héros de son livre… (Tous deux, prénoms d’emprunt)
Artifices est sa huitième publication.
De quoi s’agit-il ?
C’est l’histoire d’un lieutenant de police, Abel Bac, un drôle de flic, suspendu de ses fonctions suite à une dénonciation mystérieuse. Il vit seul et déteste la terre entière, refuse que quiconque entre dans son appartement, achète du Doliprane pour nourrir ses orchidées et se brûle le crâne aux lotions anti-poux tant les bêtes le démangent. Une nuit, une fille tente d’entrer chez lui, complètement ivre, Elsa, elle s’est trompée de porte et il la raccompagne à l’étage au-dessus, titubante. Dès le lendemain elle tente de renouer mais il la fuit.
Il se retrouve confronté à d’étranges "évènements" mis en scène dans des musées, qui semblent le concerner… des "performances" dites artistiques qui pourraient avoir un rapport avec un passé douloureux…
Qu’est-ce qu’une "performance artistique" ?
Une performance artistique désigne « la pratique d'un artiste se concentrant radicalement sur l'effectuation d'une action, et sur l'immédiateté de son pouvoir signifiant. Cela au mépris des conventions de la représentation. » (Wiki)
Vous avez compris quelque chose ? Moi, pas ! Mais dans le bouquin on vous décrit lesdites performances avec moult détails, ça va du cheval (blanc) qui gambade à Beaubourg, aux loups empaillés qui boivent du champagne, ailleurs, pour aboutir à des morceaux de corps humains accrochés à l’horloge du musée d’Orsay. Je passe sur les détails morbides extrêmes… une succession d’indices faits pour déboussoler le pauvre Abel…
Que penser ?
Il parait qu’il s’agit d’un hommage à Marina Abramović, papesse de la performance – merci pour elle –.
Comme preuve de son génie on peut citer Rhythm 0. C’est une "œuvre d'art" de six heures ayant eu lieu à Naples en 1974. Durant celle-ci, Marina Abramović se tient immobile pendant que le public est invité à lui faire ce qu'il souhaite, en utilisant notamment les 72 objets qu'elle avait placés sur une table devant elle. Parmi ceux-ci, se trouvent, entre autres, une rose, une plume, un parfum, des raisins, du vin, des ciseaux, un scalpel, … un pistolet chargé.
Abramović et les visiteurs se situent dans le même espace, indiquant que ces derniers faisaient partie intégrante de l'œuvre. Le but de la pièce, d'après elle, est de savoir jusqu'où irait le public : « De quoi parle le public et que va-t-il faire dans ce genre de situation ? » La performance est arrêtée après qu’on ait placé le pistolet sur sa tempe…
Comme autre exemple, nous avons Millie Brown qui s’est en effet spécialisé dans le vomi coloré sur toile. Ou devant la foire d’Art à Cologne, avec Milo Moire qui éjectait des œufs remplis de peinture avec son vagin sur une toile blanche… Ou encore cet autre qui vendait (cher) ses excréments dans des boîtes de conserve (cité dans le livre) …
Bon, sans doute suis-je un vieux machin, mais appelez ce genre de trucs des "manifestations", des "performances" si vous voulez, mais n’ajoutez pas "artistique" car à mon humble avis ça frôle l’escroquerie. Depuis l’urinoir de Marcel Duchamp (Fontaine), en 1917, exposé au musée national d'art moderne de Paris, par snobisme, on qualifie d’Art, toutes sortes de projections issues de cerveaux dérangés ou inaptes, et honni soit qui mal y pense !
Pour en revenir au livre, le jeu de "saute-mouton" des chapitres – un Abel, suivi d’un Mila (la performeuse), puis un Abel, et autre un Mila, etc. – me fait penser que peut-être c’est l’auteur qui nous offre une "performance littéraire"…
Quoi qu’il en soit, la séance de shampoing réciproque, anti-poux, Abel-Elsa, est d’un érotisme torride qui vaut le détour !
Je demande pardon à mon éclaireuse qui a écrit un magnifique papier que je viens de relire, bravo ! Mais nous n’avons pas la même approche du bouquin, étant d’un rationalisme forcené, je suis moins attaché à la forme qu’au fond.