"Je reviendrai à Montréal..." déclare Olivia de Lamberterie au journal La Presse en août 2018, à l'occasion de la sortie de son premier livre, Avec toutes mes sympathies.
Pourtant, Montréal lui a volé son petit frère, deux fois.
La première lorsqu'il s'y est exilé, fuyant une vie qu'il ne supportait plus, embarquant femme et enfants avec l'espoir d'un nouveau souffle, d'un peu de lumière à l'horizon.
La seconde, quand il a enjambé les barrières de sécurité du pont Jacques Cartier, le 14 octobre 2015.
"Écris ton livre" lui avait enjoint Alex, quelques temps plus tôt, quand tout n'était pas encore perdu.
Elle qui vivait du bonheur de lire les livres, de les partager, berçant nos dimanches soirs de sa voix douce et passionnée au Masque et la Plume, s'est finalement lancée pour parler de l'indicible.
"Ce livre n'aurait jamais dû exister, puisque tu n'aurais jamais dû mourir"
Alex souffrait de dysthymie, trouble de l'humeur, une dépression chronique qui l'enserrait si fort de dépit de soi, de ce qu'il appelait son incapacité au bonheur.
Ses proches l'ont rattrapé à bout de bras plus d'une fois, mais le dernier mot devait lui revenir.
Et c'est là toute la beauté du geste de l'auteure que d'essayer de comprendre et d'accepter cet acte insupportable, le suicide, comme un choix, une dignité.
Avec mes sympathies est un cri d'amour et de rage. Un ode à l'absent et aux vivants.
Sans fausse pudeur et dans une dignité absolue, Olivia de Lamberterie livre sa détresse face à cette vie qu'elle va devoir affronter "décapitée".
En revenant sur son enfance avec Alex, elle fait éclater la lumière qui perçait toujours la carapace de ce frère trop sombre.
L'auteure investit la fraternité avec une justesse absolument déchirante.
Elle fait rejaillir ce qui existe de plus beau dans ce lien du sang, cette relation unique faite de l'apprentissage commun, cette intimité presque innée.
Avec toutes mes sympathies n'est certes pas un objet de littérature, mais sa sincérité touche droit au cœur.