En son temps (années 20-30), ce roman de Kessel a été considéré comme pornographique. Je souris et mesure aujourd'hui combien ce terme a pu évoluer.
Pornographie suppose complaisance, voyeurisme. Or ce roman n'est pas complaisant et si peu voyeur. Le style, la diction de Kessel sont complètement détachés, presqu'impersonnels et surtout neutres. Ils tiennent de l'autopsie in vivo.
Ce que raconte le roman, c'est à première vue l'écart ou le fossé qui peuvent exister dans l'amour (conjugal) entre le sexe et la tendresse. Dans un deuxième niveau, c'est le désir d'être soumis. J'essaie de clarifier. Alors que Séverine, femme bourgeoise et aisée, est adulée, adorée et possède son mari et tant d'autres à ses pieds, elle aimerait, est tentée et fascinée, voudrait n'être qu'une épouse soumise. Servir, en somme et ne plus être servie. Le seul moyen qu'elle trouvera, qui fera ressortir d'anciens ressorts enfouis dans sa mémoire, sera la prostitution - dite de luxe - dans une maison de rendez-vous. Elle y obtient dans la violence ce qu'elle ne connait que dans la douceur et le respect. Bien entendu, les évènements s'enchaineront, mais on ne sera plus que dans l'accomplissement et ce n'est plus mon propos.
Par contre, ce n'est pas un roman d'aventure. Ce que Séverine recherche ne s'apparente pas à un désir de liberté, de libération d'un quelconque carcan, bien au contraire. Ella a profondément honte de ses impulsions, même si elle finit par trouver parfois son contentement. Et d'ailleurs, cette pseudo-liberté se trouve être la pire des prisons.
Entendons-nous bien, il s'agit, ici, d'une femme mais de façon symétrique, on pourrait parfaitement imaginer un homme dans le même type de situation. Je dirais même que cela est, peut-être, bien plus fréquent ou banal.