Alors dans sa résidence à Los Angeles, l’écrivain français d’origine polonaise Romain Gary ouvre un jour sa porte à un chien abandonné. Or, très vite, le personnage-narrateur s’aperçoit qu’il s’agit d’un Chien blanc, venu du Sud et dressé pour agresser les Noirs. Gary décide malgré tout de l’adopter sous le nom de Batka et cherche à le rééduquer. Cette belle histoire autour de ce chien est un prétexte pour Gary pour nous décrire le monde qui l’entourait au crépuscule des années 1960. À cette période, en France et surtout aux États-Unis, la rue était un lieu qui connaissait un embrasement dû à la revendication par exemple des droits sociaux avec les afro-américains derrière Martin Luther King Jr. La lecture de ce livre nous permet d’ailleurs d’en apprendre un peu plus sur les contestataires sociaux et ses associations, un sujet assez hors de portée pour nous européens. Ce climat de violence et de chaos nous est bien restituer.


Pour en revenir à l’histoire, l’auteur que nous connaissons bien s'intéresse à des histoires vivantes et humaines dont il a été le protagoniste. Sur sa route, les humains et animaux se rassemblent dans une espèce de fable moderne. La mission de l’homme est justement de ré-« humaniser » au sens éthique la bête endoctrinée pour haïr son prochain d’une certaine couleur de peau. En ça, l’ouvrage envoie un message universel magnifique. Ce livre est d’autant plus riche qu’il s’agit d’un mélange de souvenirs mais aussi d’un imaginaire, bien digne d’un romancier.


Là où Gary aurait pu poursuivre son récit pour en faire une histoire de jeunesse prévisible, l’auteur de La Vie devant soi fait un parallèle entre la souffrance de son chien et la triste mentalité raciste à éradiquer d'une partie du peuple américain. Publié en 1970, le livre est « à chaud » sorti juste après l’expérience de Gary en tant que témoin de son siècle face au cri revendicatif de la communauté noire américaine. Gary a l’occasion d’esquisser cette génération de la fin des années 1960, une civilisation de la rébellion. Est-ce une génération violente perdue d’avance ? Ne doit-on plus faire confiance en l'humain ? Pour Gary, véritable humaniste, il faut penser que l'autre c'est nous, quelque soit nos différences. Mais quelle attitude adoptée face à une telle confusion revendicatrice ?
Un amour se dégage des personnages dans la description qu'il nous donne, ce qui suscite un attachement de notre part. Dès lors, nous croyons au changement des mentalités et de la « maladie » de Batka. Gary, protagoniste de son récit, a deux objectif : soigner Batka et survivre dans un contexte d’extrême violence qui se rend les coups.


Victime de l’ère du temps, cette civilisation de rébellion qui dépasse les frontières est causée notamment selon l’auteur par les mass médias. Il s’agit d’une guerre de l’image mettant parfois en scène des célébrités et leur engagement idéologique. Gary défend également une thèse de la visibilité très intéressante. Selon lui, grâce à ces manifestations sociales, les Noirs ont surpris les Blancs en devenant du jour au lendemain « visibles » ce qui crée cet état de tension. Cette recherche d’égalité est-elle pour le bien de l’amour universel ou peut-elle dériver vers une volonté de revanche ? Cette lutte raciale est une noble cause mais ne doit pas aboutir vers l’inhumain.


Faisant preuve parfois de longues digressions, le récit impressionne par son écriture et surtout par la chute, décidément une des marques de fabrique signée Romain Gary au même titre que celle de La Promesse de l’Aube.

Irénée_B__Markovic
8

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le 22 juin 2016

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Ikarovic

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