Alice est une petite anglaise de sept ans et demi, elle joue tranquillement avec ses chats, et son imagination fertile la pousse à changer la petite chatte noire en reine d'échecs rouge, mais l'animal ne l'entend pas de cette oreille... Vexée la fillette se tourne vers un nouveau jeu, elle imagine un autre monde de l'autre côté du miroir du salon, un monde où tout serait inversé. Au début les choses sont simples, il ne s'agit que d'une simple inversion de perspective selon l'axe du miroir, mais très vite elle pousse les détails plus loin, les livres seraient écrits à l'envers et le feu ne brûlerait pas vraiment. Elle raconte tout cela à voix haute à ses animaux de compagnie, elle leur dit qu'elle désire que le verre du miroir devienne une brume pour la laisser découvrir ce monde étrange de l'autre côté, et à peine ces mots prononcés, elle se retrouve à l'endroit fantasmé. Le nouveau salon est rempli de vie, les tableaux semblent bouger et dans la pendule, un visage de vieillard regarde Alice en souriant. Plus étrange encore, en regardant bien, elle découvre que les petites figures du jeu d'échec ont pris vie, et ont leur caractère. En voulant sauver le couple royal blanc, elle leur fait une frayeur incroyable, ceux-ci ne comprennent pas comment ils peuvent être soulevés en l'air, la prennent d'abord pour un volcan. Les pions ignorent Alice qui tente de les rassurer, sans doute leur cerveau serait-il trop heurté par l'hypothèse qu'elle existe réellement. Agacée, la fillette laisse les pièces à leurs discutions royales et tombe sur un livre écrit à l'envers, elle le place devant une glace et tombe sur un curieux poème intitulé "Jabberwocheux" dont la signification la laisse perplexe. Elle décide donc d'aller visiter les autres pièces de cet étrange univers, à commencer par le jardin. Là aussi, la vitalité a envahi les choses d'habitude inanimées, et les fleurs lui font un accueil plutôt désagréable, se moquant de ses cheveux qu'ils prennent pour des pétales tombants et désordonnés, elle leur demande si il y a d'autres fleurs comme elle dans le jardin, non enracinées, et c'est là qu'elle va rencontrer la Reine rouge qui va lui expliquer le chemin à prendre pour qu'elle puisse, elle aussi, devenir reine.

J'ai été fascinée depuis ma plus tendre enfance par le Walt Disney tiré de cette nouvelle, bien que je trouvais le personnage d'Alice totalement insipide. Des ajouts superbes ont été faits par le studio de dessin animé, comme le chat de Cheschire, ou bien Monsieur Dodo... Et d'autres oubliés malheureusement comme Heumpty Deumpty ou la bataille entre le Lion et la Licorne. Les traits ont été épaissis et la caricature de la reine tyrannique est encore plus évidente chez Walt Disney. De nombreux critiques disent y voir une dénonciation du régime anglais dans ce personnage sévère et capricieux. J'avais des grandes attentes quand à cette nouvelle et j'avoue qu'elles ont été un peu déçues, mais j'y ai trouvé d'excellentes idées tout de même. L'histoire suit les mouvements d'une partie de jeux d'échecs et chaque case représente un nouveau lieu du monde de l'autre côté du miroir, Carroll insiste au début du livre sur le fait que sa partie est tout à fait possible schémas à l'appui, mais même en étant une novice des échecs je doute qu'un pion puisse devenir une reine même en ayant parcouru l'échiquier, il me semble que c'est plutôt dans le jeu de dames que ce procédé est possible. On sent bien ce qu'on appelle l'humour anglais dans les lignes de Carroll, le jeu de l'absurde, de l'attendu qui n'arrive pas, c'est quelque chose qui ne rapporte pas tout les suffrages, et heureusement, moi, j'aime. Un autre détail qui m'a plu, dans les poèmes l'utilisation et l'invention de mots-valises qui auraient ravi toute la clique de l'Oulipo, comme "silictueux", qui signifie : souple actif et onctueux. Par contre le personnage d'Alice ne m'a pas beaucoup plus emballée que dans la version que je connaissais, face aux personnages hauts en couleur qu'elle rencontre elle ne fait pas le poids, et elle n'a ni un comportement d'enfant , qui par sa logique encore en construction, se plierait aux folies de ses interlocuteurs, ni d'une adulte bien élevée qu'elle affiche. La nouvelle est également un peu courte, et sa fin tellement attendue.. Je suis restée un peu sur ma faim. Cependant, De l'autre côté du miroir reste un classique de part l'imaginaire et la poésie apportée par l'auteur, un livre comme aucun autre.
Diothyme
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le 21 févr. 2011

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