En fait, c’est le « nous » qui me dérange, et si je parle de « moi » c’est pour me désolidariser du « nous » mais comme suis un quidam quelconque, des "moi", il y en a des milliers…
Je me souviens ! Je me souviens de ma toute première expérience professionnelle, à a peine vingt ans, l’Éducation Nationale m’avait envoyé comme "Instit-roue-de-secours" dans un bled paumé du Nord-Est de l’hexagone, territoire réputé "déficitaire" – d’où le bouche-trou – où je retrouvais deux jeunes filles de mon âge, aussi infortunées que moi, émigrés du Sud-Ouest ou carrément du Sud… Dans la "formation" que nous suivions se trouvait un test de caractérologie… impossible d’y couper… l’une des demoiselles s’est retrouvée cataloguée « Colérique », l’autre « Sentimentale » et votre serviteur « Actif exubérant » (ou « Passionné »). Bien sûr ça nous a beaucoup amusés, on a clamé haut et fort que c’était "bidon", enfin, que ça ne voulait rien dire du tout. Mais, chacun pour soi, on a bien été obligé de reconnaître que c’était tout à fait ça !
« Actif exubérant », soixante années plus tard, toujours actif et un peu moins exubérant quand-même, et vous voudriez que j’aime ne RIEN faire le dimanche (ou autres) ? Ça m’est littéralement impossible, je ne suis ni cérébral ni contemplatif, je dois, en permanence agir ou/et apprendre, c’est viscéral… Mais je ne vais pas non plus prendre la défense des « apologistes-du-travail-des-autres » même s’il me semble que cette désignation me parait très restrictive, tendancieuse voire tout à fait démagogique pour attise aisément la haine dans les chaumières en faisant preuve soit d’une mauvaise foi abusive soit d’une méconnaissance grave quant à l’emploi du temps des leaders d’entreprise.
Non, je tiens à prendre la défense du « travail ». Mais qu’est-ce que le travail ? Larousse donne comme définition :
"Activité de l'homme appliquée à la production, à la création, à l'entretien de quelque chose (Travail manuel, intellectuel)."
Et pour paresse : "Comportement de quelqu'un qui répugne à l'effort, au travail, à l'activité."
Alors, pourquoi, parce qu’on aimerait ce que l’on fait, ce ne serait plus du travail ? À dix ans, j’ai découvert l’astronomie et j’ai toujours rêvé de travailler dans le domaine spatial, et j’ai tout fait pour…
Alors OUI, j’ai aimé mon "travail" de conception et développement, dans un domaine perfectionniste où le coût était secondaire devant la réussite fonctionnelle. Où les échecs étaient vécus comme des tremplins d’enrichissement (d’apprentissage) : à chaque tir réussi, on se congratulait et repartait vers notre tâche du jour, lors du premier vol d’Ariane 5 qui s’est soldé par une superbe explosion, on a fait « la gueule » mais on a retroussé les manches plein d’enthousiasme : on allait apprendre quelque chose, et nous améliorer !
J’irais même plus loin, à partir du moment où une activité nous accapare quasiment à plein temps, je la considère comme un "travail", même si elle n’est pas rémunérée. Jeune retraité, j’ai exercé une dizaine d’activités quasi à plein temps dans une médiathèque hospitalière pendant plus de dix ans (Prêts aux patients, informatisation, statistiques, comité de lecture, formation des bibliothécaires, liaison avec la fédération nationale, bureau exécutif, vice-secrétariat général, etc.) … et j’y ai rencontré une multitude de personnes qui accomplissaient leur "travail" avec beaucoup de sérieux et de plaisir sans songer à un enrichissement financier.
Ne confondons pas travail et corvée ! Même si pour beaucoup il n’y a pas de différence, malheureusement.
Aussi ai-je décidé, dans une très serviable intention, de m’adresser directement à ces apologistes-du-fare-niente, lesquels s’échauffent, depuis quelques années, au sujet de « la valeur paresse » qu’ils ont hissée au rang de dogme.
Car les apologistes-du-fare-niente, qui se croient les maîtres du monde, sont ces temps-ci, ce me semble, sur les dents, et luttent vaillamment pour la préservation de leur espèce.
Car les apologistes-du-fare-niente, tout obnubilés qu’ils sont par le désir de ne rien faire, craignent que mon attrait immodéré pour le travail ne fasse vaciller leur modèle qu’ils pensaient jusqu’ici indiscutable, inexorable, incontestable, irréfutable, incontournable, impérissable, indépassable, irréfragable, indétrônable, indispensable et, reprenons notre souffle, aussi évident à leurs yeux que leur nez au milieu de la figure.
Un modèle étendu aux dimensions de la planète, duquel ils tirent un immense orgueil, et qu’ils jugent seul digne d’intérêt, puisque propice aux grandes rêveries – les seuls biens acquis dans la contemplation –, et ce au mépris des ravages causés et sans risque aucun d’être accusés de crimes.
En un mot, la supermartingale, le modèle idéal, le truc suprême, le fin du fin.
Un culte.
Un culte qui emplit toute leur vie.
Un culte auquel ils adhèrent avec une impétueuse certitude et dans le déni monstrueux de ses failles.
Un culte qui excommunie toute autre voie, toute autre aventure non soumise à la paresse languissante.
Un culte n’ayant d’autre finalité que de se perpétuer et de se perpétuer jusqu’à son parachèvement.
Autrement dit : jusqu’au désastre.
Dois-je continuer ? Car il faut bien le dire :
Les apologistes-du-fare-niente nous bassinent avec ce préjugé, relativement récent dans l’Histoire des hommes, selon lequel :
La paresse serait un devoir moral,
Le travail : une déchéance,
Le goût pour la rêverie et l’apathie : une inclination naturelle,
Le désir de flemmasser : inné chez les enfants.
Et conchient le travail qu’ils considèrent comme :
Une putain pêcheuse d’hommes,
L’oreiller du diable,
Une démone nourrissant tous les vices et particulièrement la cupidité,
Une perversion de l’esprit,
Une calamité publique,
Un cancer social qu’il s’agit d’extirper par une chirurgie ablative.
Françaises, français, ne travaillez jamais,
Et nul doute que vous aurez tout gagné !
Même si, parfois, il me semble entendre une diatribe à la "Mélenchon" qui, comme vous, me faisait sourire à ses débuts, mais, à force, est devenu fatigant, agaçant et maintenant grotesque, je vous mettrai, néanmoins, un accessit (excusez l’arrogance d’un non littéraire) car, de votre langue ibérique maternelle au « fragnol » de votre entourage d’enfance, vous nous donnez une si belle leçon de l’usage de la langue française* que votre façon de jongler avec les mots nous font rougir de notre infâme verbiage.
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(*) Ainsi, grâce à vous, chère Lydie, j’ai découvert le mot « aptonyme » que jusqu’à présent je n’avais pas eu l’occasion de glisser dans une conversation. Sur ce site érudit, je n’apprendrai rien à personne en précisant qu’il s’agit d’un nom de famille d'une personne qui est étroitement lié à son métier ou à ses occupations. Mais en consultant Google, les exemples pleuvent : comme cette gynécologue Nicole SOULACROUP, ou ce pédiatre A. BEBEOUIN-OUIN voisin de la Masseur-Kinésithérapeute Brigitte CRAMPE et de l’Ostéopathe Josiane TIREMOILOSS cousine de la Psychiatre Roselyne BARGEOT compagne de l’Avocat André PERPETE en qui on peut avoir toute confiance ainsi qu’à son associé Krimo RABET, etc… etc… Rien que pour cette franche partie de rigolade mon 5/10 initialement prévu va prendre une étoile de plus ! (Et n’oublions pas la très adorable gynécologue Claudine MINOUX ! ...)