En finir avec Eddy Bellegueule est le premier roman du jeune Edouard Louis. Dans ce récit autobiographique poignant et cruel de vérités, il nous dépeint sa jeunesse chaotique qu'il a réussi à fuir, à contre courant.
Ce livre regorge de choses répugnantes, de personnages piteux rongés par la honte, qui prennent part à de terribles scènes qu'un gamin ne devrait jamais ni voir ni subir. Cela se passe en France en 1990-2000, dans un village du Nord où la pauvreté, le chômage, le racisme, la phallocratie, l'homophobie, l'alcoolisme, la consanguinité et le travail à l'usine forment un ensemble de causes-conséquences difficile à fuir. Eddy doit grandir avec son homosexualité dans un contexte qui, vous l'aurez compris, ne lui permet pas de vivre mais plutôt d'assister à sa vie.
L'auteur aurait facilement pu tomber dans un réquisitoire contre son passé mais à aucun moment il ne juge. Ce qui est intéressant, c'est qu'il y a le travail du romancier, qui ne fait que dire sans pour autant s'approprier la compassion du public, et il y a celui du sociologue, qui dresse le constat de cette société prolétarienne victime de sa propre misère et gangrenée par tout ce qui a été évoqué précédemment.
Certains pourront reconnaître une partie de leur passé. Il me semble qu'une sorte de catharsis peut s'opérer, ou plus simplement peut-être l'apparition d'un sourire lorsque le livre se finit, comme pour se dire que c'est derrière soi.
Petit bémol selon moi, l'auteur ne veut pas aller plus loin que sa "fuite". J'aurais aimé voir comment il a vécu le lycée et l'internat où il est allé, comment il a vécu le retard culturel et qu'est-ce qui s'est opéré chez lui pour qu'il veuille écrire, et surtout, le rendre public.