On continue et on recommence
Budaï, linguiste renommé parti pour Helsinki, se retrouve dans une ville inconnue peuplée d'inconnus s'exprimant dans une langue inconnue et pratiquant un sport inconnu. À partir de cette intrigue bien proche de celle qui suffit à Kafka pour écrire "le Château", Ferenc Karinthy réussit à durer près de trois cents pages, entièrement au présent, sans trop se répéter et en restant crédible, ce qui est déjà une prouesse. Avec à peine une cinquantaine de répliques dans la langue locale. Évidemment, comme "le Château", "Épépé" charrie son lot de métaphores et d'allégories possibles — lectures métaphysique, sociale, politique, littéraire, etc. sont ainsi possibles, sans que le texte se laisse enfermer par l'une de ces lectures ni s'y limite.
Comme le livre, d'une infinie richesse, peut – et gagne à – se lire très vite, on peut jouer à ce jeu : on lit, on s'arrête toutes les vingt minutes et on écrit sur une feuille toutes les explications possibles à la mésaventure de Budaï ; en principe aucune ne sera satisfaisante ; arrivé à la fin du livre, on continue et on recommence.