Erasmus, un nom parfaitement choisi...!!!
Pour moi avant la lecture de cette biographie du grand Stefan Zweig, Érasme était juste le monsieur dont le nom latin est utilisé pour désigner un programme universitaire européen d'échanges d'étudiants.
Je ne savais pas du tout, ou presque car j'avais vaguement entendu parler de son oeuvre la plus célèbre "Éloge de la Folie", discours satirique où toutes les couches de la société s'en prennent plein la gueule, qui était cet Érasme et je n'aurais certainement pas eu l'idée de chercher à le savoir si celui qui a écrit des biographies absolument passionnantes sur Marie-Antoinette, Marie Stuart ou encore Joseph Fouché n'en avait rédigé une sur cet homme.
Alors Érasme, son sacerdoce : l'indépendance, son pire ennemi : le fanatisme... Et bien évidemment en ennemi du fanatisme, il a vécu à une époque où ce dernier ne s'est jamais aussi bien porté. Cette époque est le début du XVIe Siècle, qui va marquer un point de non-retour dans l'Histoire, celle de la Réforme luthérienne, celle de l'opposition entre l'Eglise de Rome et un Protestantisme né des abus de la première.
Abus qu’Érasme a été le premier à dénoncer, mais pas à combattre car c'était un homme dans les livres, n'ayant comme seule arme sa plume, le premier à lancer l'idée d'une Réforme mais pas à la faire appliquer ; Érasme n'était pas du tout un homme d'action, c'était un humanisme, un indépendant qui refusait de prendre parti dans une époque où si on n'était pas pour on était forcément contre, un homme qui n'était pas aux côtés de la Foule mais au-dessus.
Zweig se concentre en conséquence plus sur la pensée, sur les idées du savant que sur ses actions ; ce qui est obligé vu que c'était l'exact opposé d'un homme d'action...
L'exact opposé donc d'un certain Luther, opposition qui est le deuxième grand aspect traité de la vie d’Érasme dans cette biographie, son opposé "parfait", son opposé physique, son opposé psychologique, son opposé dans les méthodes. L'intellectuel contre l'homme d'action, l'humanisme contre la barbarie, l'internationalisme (c'est pas pour rien qu'il n'écrivait qu'en latin, l'espéranto de l'époque !!!) contre le nationalisme, ce n'est pas un hasard si Stefan Zweig a écrit cette oeuvre en 1935, époque idéale pour montrer que l'Histoire est un perpétuel recommencement.
Il le fait parfois avec une certaine ambiguïté en saluant l'humaniste pour son idéal, pour son refus de prendre parti tout en le critiquant souvent de ne pas avoir su, ou plutôt voulu, agir concrètement. C'est la grande réserve que je fais sur l'ensemble, et qui lui a souvent été faite d'ailleurs.
Mais quoi qu'il en soit, je suis content de beaucoup mieux connaître un homme dont la soif d'indépendance et son idéal humaniste en font une figure à jamais intemporelle.
Il mérite totalement qu'on donne son nom à ce programme universitaire qui lui correspond parfaitement, il aurait certainement apprécié cela...