Un salopard qui vous veut du bien (ou pas...)
Oui, j'ai mis 10, j'ai hésité mais bon, il le mérite tellement et j'ai vraiment pris un plaisir monstre à lire ce bouquin. Explications :
"Gagner une guerre, c'est bien joli, mais quand il faut partager le butin entre les vainqueurs, et quand ces triomphateurs sont des nobles pourris d’orgueil et d'ambition, le coup de grâce infligé à l'ennemi n'est qu'un amuse-gueule. C'est la curée qui commence. On en vient à regretter les bonnes vieilles batailles rangées et les tueries codifiées selon l'art militaire. Désormais, pour rafler le pactole, c'est au sein de la famille qu'on sort les couteaux. Et il se trouve que les couteaux, justement, c'est plutôt mon rayon...".
Voilà la quatrième de couverture de Gagner la guerre, et désolé, mais il est difficile d'en dire plus tellement le suspense et les rebondissements sont présents, et dès les premières pages. Oui, Ciudalia a gagné une bataille en écrasant la flotte de l'empire ressinien, mais là n'est pas le sujet car c'est au sein de la République que les couteaux sont de sortie, et pour cela rien de mieux qu'un assassin sans scrupules.
Jean-Philippe Jaworski dépeint donc l'histoire du maître assassin don Benvenuto, tueur arrogant, caractériel, détestable parfois mais tellement captivant. Bref, un personnage humain, même un peu trop parfois quand les raclées qu'il prend sont communicatives et font très mal, ce qui traduit la maîtrise des mots de l'auteur par sa précision. En effet, le style très lyrique se révèle aussi mordant, et montre le talent de l'écrivain à transmettre les émotions du personnage au lecteur. De plus, les dialogues sont pleins de gouailles et transpirent même parfois un argot jubilatoire rempli de mots purement inventés mais qui reste parfaitement compréhensible.
On suit donc cette crapule dans son épopée, de la flotte de la République à l'empire ressinien en passant par la très venisienne Ciudalia et les régions éloignées qui rappelle une fantasy plus médiévale. Car la fantasy reste en toile de fond mais est bien présente et sort des sentiers battus (sorcier douteux, des elfes racoleurs, etc. Bon ok le nain boit de la bière et chante des chansons paillardes mais bon...). L'auteur préfère donc s'en servir comme d'un moyen pour appuyer les intrigues politiques, les plans calculateurs des nobles, les bonnes bastons entre épéistes émérites... Bref, un roman ou tout est réfléchi et recherché pour servir l'intrigue.
L'intrigue, parlons-en, ça commence fort dès les premières pages et ça n'arrête pas durant les 900 qui suivent. Et je ne vous parle pas de petites péripéties prévisibles, non, du tout, l'auteur s'amuse à nous mener en bateau, à jouer avec nos nerfs pour nous surprendre à chaque page et qu'on ne lâche pas le livre. Le pire, c'est que ça marche, et drôlement bien!
En gros, un roman exceptionnel où tout concorde à en faire un de vos livres favoris... En tout cas, moi, ça faisait un bail que je n'avais pas lu quelque chose d'aussi jouissif!
Pour résumer en trois mots : PUTAIN LE PIED!!!