Cette oeuvre monumentale décrit de manière remarquable le quotidien de l'aristocratie russe (haute et moyenne) durant les guerres napoléoniennes (de la bataille d'Austerlitz à la campagne de Russie), mélangeant fiction et faits historiques, avec une interprétation très personnelle.
Les personnages sont d'une grande variété et leurs psychologies décrites de manière très précise: on y trouve des ambitieux, des opportunistes, des spirituels, des intellectuels, des frivoles, des mondains, des superficiels, des orgueilleux, des dépensiers, des naïfs, des impétueux, des hypocrites, des arrogants, des courageux, des égoïstes, des altruistes, des pieux, des vaillants jusqu'à la stupidité... On y alterne le russe et le français de manière quasi naturelle. Malgré la guerre se rapprochant, les intrigues continuent de s'épanouir et les ambitions individuelles de s'entrechoquer.
Mais la guerre agit aussi, malgré elle, comme une sorte de purification qui permet d'élever les âmes et de révéler la destinée des personnages principaux: les uns perdent la vie, les autres voient leur avenir bouleversé.
Pour Tolstoï, les simples individus, qui ont pris part aux événements, ont plus de poids dans le cours de l'histoire que les dirigeants et les chefs de guerre qui sont prétentieux de croire que leur action a eu une quelconque influence sur ce dernier. Il s'inscrit ainsi en faux avec les historiens de son temps. On y décèle un certain fatalisme/déterminisme et l'idée que l'entendement humain a ses limites. La nécessité prend d'ailleurs la plupart du temps le dessus sur la liberté et les choses se déroulent finalement parce qu'elles doivent se dérouler ainsi.