Trompettes de la renommée
En lisant Hernani, j'ai beaucoup ri, d'un petit rire ricanant, entre gentille moquerie et attendrissement- c'est un peu dommage pour quelque chose qui se veut une tragédie.
Il y a quelque chose de très mignon dans le romantisme d'Hugo, qui a quelque chose du petit garçon qui vient d'étudier à fond son encyclopédie imagée de l'Espagne à la Renaissance, et décide de s'inventer sa petite histoire sublime dans ce cadre là. C'est idyllique, et naïf, et plein de "Miséricorde" "Je meurs!" "Vous n'êtes pas un vrai espagnol!" etc.
C'est ficelé de manière hyper classique, comme une tragédie du XVIIème, mais sans la maîtrise stylistique parfaite, ni les contraintes. Du coup, sous une volonté de "drame" et de suscitation d'émotion, on tombe dans ce qui ressemble à un vaudeville longuet, avec son lot de lubriques, d'amoureux fous, et de vieilles personnes bornées-mais-pleines-d'honneur. Mention aux multiples confrontations des rivales, qui se snobent au tour à tour de la manière la plus princière qui soit.
J'ai particulièrement aimé le personnage du roi Carlos, que tout le monde veut combattre en duel, et qui, estimant que ce serait déshonorant de faire un duel avec des adversaires d'aussi basse condition et extractions, refuse systématiquement le combat, pour autoriser "son assassinat".
Le pauvre Hernani, qui ne s'attendait pas à être mouché en plein élan revanchard se voit obligé de lui offrir son manteau pour éviter qu'un pauvre bougre de la ville l'assassine, et le prive de sa vengeance.
Bien sûr, Hugo n'est quand même pas tout à fait un bleu, certaines scènes ont de l'intérêt, il y a de belles répliques.. J'estime que les principaux problèmes de la pièce sont la psychologie des personnages (inexistante hors des grandes lignes vite définies) et surtout du rythme. C'est effroyablement long, pour du théâtre, et rien ne le justifie, un tas de scènes sont inutiles, et extrêmement répétitves. C'est vraiment cette longueur qui empêche d'apprécier la pièce, à la réflexion. Même les petits éclats, et les répliques savoureuses ou kitchisssimes deviennent fades à la troisième variante.
Il y a Dona Sol qui est belle, et que tout le monde aime, Hernani qui n'arrête pas de répéter son prénom, et de s'affirmer prince des voleurs au coeur pur, meilleur qu'eux tous, le roi, le vieil oncle promis à Dona Sol. Toute l'intrigue tourne autour de ce soleil espagnol, pourtant débilitant et fade; et qu'on se retrouve, et qu'on se regarde dans le blanc des yeux, puis, Oh, un rival nous surprend, CIel! Miséricorde! Hernani! Dona Sol! [Individu] indigné. Oh, tuez-moi, je ne peux vivre sans vous! Non, moi, je me tue, car je gâche votre vie! Non, moi je te tue, parce que tu me piques ma gonzesse! ... mais non, toi, tu ne peux pas, ou pas tout de suite, parce que [argument trololo/honneur/rappelle-toi, y a un troisième trouduc amoureux d'elle, on pourrait s'allier!]. Ah, merde, tu as raison. Ben, qu'est-ce qu'on fait, alors? ... Hernani! Non, Dona Sol, je dois partir, retourner aux ténèbres, te laisser vivre enfin, mais nous nous reverrons! Ah, il part, je me meurs, c'est un traitre, il ne m'aime donc pas! Et ça recommence, jusqu'à la fin, fanfare, drapeau, coup d'état, Miséricorde! Honneur! Gredin!
Oui, j'imagine vraiment Petit-Hugo avec son rideau de douche attaché en cape, mimant la scène, et, la trouvant géniale, désirant la partager, l'écrire le rouge aux joues.
A lire, oui, en plusieurs fois peut-être pour éviter le ressassement, depréférence à voix haute, et armé d'une brosse à chiotte, face à son pauvre animal/humain de compagnie.