Pendant mes études de lettres, j’ai rédigé un mémoire sur George Sand et plus particulièrement sur l’adaptation de certains de ses romans pour la scène. C’est donc une auteure que je connais assez bien, c’est pourquoi j’ai été surprise de tomber sur un ouvrage jeunesse, un album illustré, à son nom. La beauté du livre et la curiosité ont fait le reste et je me suis donc lancée dans la lecture du périple de ce fameux Gribouille.


George Sand a écrit ce conte fantasmagorique à la fin de sa vie lorsqu’elle était à Nohant. La nature y tient une place prépondérante et je pense que ce n’est pas un hasard.


Comme dans de nombreux contes, nous faisons la rencontre d’un jeune héros bon et doux qui au contraire de son abjecte famille ne veut que le bien. Gribouille incarne l’amour inconditionnel et la naïveté. Sa famille le maltraite et le repousse mais lui ne cesse d’espérer avoir leur affection. Alors qu’un après midi, il fait une pause près d’un chêne qu’il aime bien, Gribouille se fait piquer par un bourdon. Alors qu’il pardonne gentiment à l’insecte qui l’a fait souffrir, un étrange songe le prend où il rencontre un homme bizarre vêtu de violet et à la voix grésillante, lui promettant mille richesses.
Ce personnage n’est autre que le M. Bourdon l’antagoniste de notre histoire. Gribouille va s’apercevoir que le monde dans lequel il évolue n’est pas si simple qu’il y parait. Insectes et humains se fondent dans des créatures anthropomorphes. On ne sait jamais vraiment à qui on a affaire. Au fil de ses rencontres et de ses engagements, Gribouille va résoudre un conflit qui le dépasse et rendre au monde l’amour qui lui est nécessaire pour bien fonctionner.


Je trouve que pour l’époque, l’auteur fait preuve d’une grande imagination et d’une vraie modernité. La dualité humain/animal est habilement entretenue. On ne sait jamais vraiment où se trouve la frontière, où s’arrête la métaphore et ou commence le proprement fantastique. L’auteur nous invite à travers la naïveté du conte à s’interroger sur le secret du bonheur. Quelles sont les véritables richesses ? L’argent seul peut-il rendre heureux ? Si la leçon et les personnages restent très manichéens, une poésie magique tire le conte vers le haut. L’onirisme du monde de la reine des prés, dans lequel Gribouille est recueilli, est propre à émerveiller et faire rêver. De même, la fin tragique, onirique et surprenante, laisse une saveur spéciale à la lecture. La beauté du désespoir donne de la force à cette conclusion.


Dans l’édition que j’ai pu récupérer, les illustrations jouaient beaucoup dans l’atmosphère féerique et fantastique. L’illustrateur sait entretenir le doute entre l’insecte et l’humain. Il rend aussi habilement le foisonnement fascinant de la nature et la beauté de la magie païenne de laquelle l’auteure semble s’inspirer. Un régal pour les yeux.


Cette histoire reste bien sûr destinée à un jeune public et si les adultes y trouveront une magie poétique attendrissante , il y manquera tout de même la complexité de la réflexion. Une belle parenthèse à partager avec les plus petits.


Critique à retrouver sur le site du mouton curieux

titaboris
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le 26 avr. 2021

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