Comment un artiste raté, un frustré de la vie, particulièrement paresseux, un type incapable de véritablement nouer des relations sociales a-t-il pu accéder au pouvoir suprême d'un des pays les plus modernes et les plus cultivés du monde ? Comment a-t-il pu entraîner celui-ci et le reste du monde dans une guerre mondiale et le conflit le plus meurtrier de l'Histoire ? Comment a-t-il pu donner lieu au plus atroce des génocides ? Comment a-t-il devenir le nom le plus honni au monde, celui de l'incarnation absolue du Mal ?
La réponse (ou les réponses !,) vous l'avez dans cette oeuvre biographique, une oeuvre-somme, considérée comme la référence ultime des très très très (très) nombreuses biographies sur Adolf Hitler.
Non, ce n'est pas une histoire de "triomphe de la volonté" comme la propagande de Goebbels voulait le faire croire, non ce n'est pas uniquement un talent d'orateur et un charisme exceptionnels en plus d'une grande capacité à manipuler les autres et à exploiter leurs faiblesses. En fait, c'est l'histoire d'un artiste raté, paresseux frustré de la vie, doté des "qualités" précédemment citées, qui aurait dû rester un petit agitateur de brasseries munichoises, mais qui s'est laissé porter par une époque particulièrement trouble, donc idéale pour lui, la seule qui pouvait le faire accéder au Pouvoir, sachant juste à l'occasion saisir les "bonnes" opportunités quand elles se présentaient.
En fait, avant l'accès au Pouvoir, c'est l'histoire d'une époque à travers le parcours vraiment atypique d'Hitler que l'historien Ian Kershaw, grand spécialiste du nazisme, nous raconte. Ensuite, et après l'accès au Pouvoir, c'est l'histoire d'un système monstrueux, absolument atroce, qui nous est racontée ; dont Hitler est le pivot indispensable, qui n'aurait pu exister sans lui et qui ne lui a pas survécu.
Le nazisme c'est Hitler (je parle bien UNIQUEMENT dans le sens qu'il n'aurait pas existé sans lui !), tous les Himmler, Goering, Goebbels, Heydrich, Speer et autres nombreux tristes sires grosses enflures qui gravitaient autour de lui, n'auraient pas existé sans lui et le grand pouvoir de fascination qu'il exerçait. Tout ce beau petit monde "travaillait en direction du Führer". Tout ordre sibyllin (oui, parce qu'il n'a jamais ordonné d'une manière précise une atrocité, et, à l'exception d'une seule, jamais officialisé par écrit, pour conserver une bonne image au regard de l'Histoire !) émanant de lui devait être interprété par son entourage et exécuté par celui-ci. "Travail en direction du Führer", une expression qui revient trop souvent pour qu'on n'y voit pas une ironie particulièrement sarcastique (et typiquement anglo-saxonne de l'auteur !). On n'oubliera pas d'inclure, dans cette gravitation, des millions de personnes plus ou moins passives. "Travail en direction du Führer" = 50 millions de morts et des millions d'autres traumatisés.
Une plongée exhaustive, plus de 1100 pages, dans la psyché d'un homme (ouais, c'est ça qui est le plus choquant... un homme !), dans celle d'une époque, dans celle de tout un système, de tout un conflit. Une biographie, qui arrive en même temps à être à hauteur d'homme et à être d'ampleur mondiale, étant, en effet, vraiment celle de référence.