Il est, avant tout, un fascinant "livre maudit". Seule la mésestimée version de 1992 ou le très méconnu téléfilm de 1968 adaptent l'histoire entière tout en arrivant à rendre totalement son atmosphère hantée et pesante. Et j'aime beaucoup la version de 2009, malgré ses défauts.
Le seul et unique roman d'Emily, son chef d'oeuvre et le chef d'œuvre, également, parmi tous les romans des sœurs Brontë dont aucun ne pourra retrouver la saveur de ce roman. Hapax, pour ne pas dire OVNI, dans son temps et, sans doute, pour toujours.
Le chef d'œuvre de la littérature "gothique" et au-delà du romantisme anglais, aussi : je mets des guillemets à gothique parce que Les Hauts de Hurlevent, ça n'est pas que ça même si c'est le côté le plus prégnant, celui pour lequel on s'en souvient, celui pour lequel il est le plus connu, très certainement: c'est le côté sombre, tourmenté, l'amour fou et destructeur au delà de la mort, le personnage machiavélique et charismatique de Heathcliff, le livre qui hante encore quand on a refermé la dernière page, certes.
Mais c'est aussi la psychologie fouillée des personnages et qui exhume le moindre de leurs maux, de leurs pensées, de leur plans, de leurs blessures ; un panorama à sa façon de la société anglaise de la fin du XVIIIème siècle et du début du XIXème ; la tragédie par excellence dans la littérature (de l'époque).
Et l'image que je retiens, ces paysages des landes ventées du Yorkshire (grande inspiration d'Emily Brontë et paysage de solitude aride qui est sans doute un décor parfait pour encore ajouter à l'atmosphère angoissante, dans une certaine mesure, que revêt le roman) qui sont incroyablement présentes au fil de ces pages et sont, évidement, à l'image de ce monde, de ces personnages torturés et aussi complexes ; le miroir de leurs pensées.
C'est aussi, je crois, quelqu'unes des plus belles citations dans la langue anglaise et notamment celle-ci : "If all else perished, and he remained, I should still continue to be; and if all else remained, and he were annihilated, the universe would turn to a mighty stranger: I should not seem a part of it.", magnifique citation de Cathy qui me reste encore à l'esprit en VO mais dont j'ai totalement oublié la traduction en traduction en français même si la traduction est, effectivement, de qualité.
On est juste baladés entre plusieurs sentiments pour ces personnages à la fois insupportables et odieux par certains aspects mais aussi attachants, quand on a eu accès à leurs failles. On est plongés jusqu'à la fin dans cette atmosphère sombre, dans cette histoire de vengeance familiale qui s'étend jusqu'à la deuxième génération.
(critique de 2017, réécrite le 30 juin 2024)