L'avantage de pas savoir l'Histoire telle qu'elle s'est déroulée pour tout un peuple, c'est que tu prends tout pour comptant. Un peu comme ce couillon d'Ingénu sauf qu'on est pas du tout entrain de te raconter une histoire chouette. Plutôt un constat triste, dégueulasse et qui pue la haine de l'Homme. Où il est donc difficile de ne pas prendre parti envers le narrateur.


Tommy Orange place son bébé sous une augure qui fait du bien, loin des légendes masculines qui dominent la littérature américaine ; Gertrude Stein en lui empruntant ces quelques mots "There is no there there".


Même sans avoir fait une licence Histoire de l'Amérique on comprend qu'il va être question d'identité, de pertes de repères, de confrontation entre valeurs ancéstrales et métissages culturels, d'anciens contre jeunes, de traumatismes liés aux horreurs qu'ont subis les amérindiens depuis leur colonisation.


Roman choral et hyper diversifié en ce qui concerne le nombre de personnages, Ici n'est plus ici détonne. On pense tout de suite à Gus Van Sant pour Elephant, on pense à la Zadie Smith de Ceux du Nord-Ouest pour la richesse des personnalités et on gobe chaque chapitre comme des pilules annonçant une fin tragique quelque soit le degré d'objectivité qu'on puisse avoir en chacun de nous.


Autrement dit, c'est un putain de chef d'oeuvre. J'ai pas lu beaucoup de livres ayant pour auteurs des romanciers amérindiens mais le peu que j'ai lu arrivent à véhiculer tout le poids de leur culture et de leur détresse dans leur créativité. C'est impossible d'y être insensible, pour de vrai. T'as le palpitant qui déraille complet, les bouts de peaux du bout des doigts qui viennent se coincer sous tes dents à vouloir espérer que et puis.


Et puis boum. L'Histoire qui se répète, comme si l'espèce tout entière était condamnée à revivre encore plus de désillusions et de massacres. À ce qu'il n'en subsiste plus rien à force de les dépouiller.


Claque dans la gueule ok mais pas pour la beauté du roman, juste la claque dans la gueule de la culpabilité et du mépris que tu peux ressentir sur la capacité de l'Homme à faire de la merde.


Lis le si t'es cap, moi je suis content de l'avoir fait.

LouKnox
8
Écrit par

Créée

le 1 juin 2020

Critique lue 223 fois

1 j'aime

Lou Knox

Écrit par

Critique lue 223 fois

1

D'autres avis sur Ici n’est plus ici

Ici n’est plus ici
Chatlala
9

Critique de Ici n’est plus ici par Chatlala

Premier roman de l'américain Tommy Orange, originaire d'Oakland, where we lay our scene, Ici n'est plus ici a fait grand bruit à la rentrée 2019, alors qu'il s'était déjà glissé outre-Atlantique...

le 8 oct. 2020

2 j'aime

Ici n’est plus ici
Choco-Doudou
7

Un livre plein de promesses

Ici n’est plus ici de Tommy Orange démarre avec tout un tas de promesses. Tout d’abord, la promesse d’un titre à élucider, un titre laconique et profond, qui nous suit tout au long du roman. Puis des...

le 13 mars 2022

1 j'aime

Ici n’est plus ici
Julius-Grakus
9

Critique de Ici n’est plus ici par Julius-Grakus

Ici n'est plus ici : leur monde est devenu immonde, les plaines sont devenues des plaies, les tribus ont été avalées dans des quartiers sordides, les seuls clans restant sont des gangs. Leur peau...

le 21 déc. 2021

1 j'aime

Du même critique

Réinventer l'amour
LouKnox
8

Critique de Réinventer l'amour par Lou Knox

Comme pour chaque essai de Mona Chollet que j'ai pu lire, c'est assez difficile pour moi de donner mon avis sans passer par un vécu perso, d'assimiler chaque phrase, chaque situation en se comparant,...

le 23 sept. 2021

13 j'aime

Ci-gît l'amer
LouKnox
8

Critique de Ci-gît l'amer par Lou Knox

Comment soigner l’amertume ?

 C’est curieux comme le sujet d’un essai philosophique peut s’appliquer en temps réel au lecteur sur l’essai en lui-même. 

 J’essaye de clarifier ; compte tenu de...

le 16 janv. 2021

12 j'aime

2

Les Aérostats
LouKnox
4

Critique de Les Aérostats par Lou Knox

Ce qu'est bien avec Nothomb, c'est quand ses histoires à problèmes de bourges qui s'occupent de bourges et qui se gargarisent de références littéraires de bourges, ça dure pas trois plombes. On...

le 27 juil. 2020

12 j'aime

5