Il va sans dire que ce livre est un grand livre.
Ayant déjà tenté de lire les Illusions Perdues il y a quelque temps, j'ai pu cette fois, grâce aux années passées, saisir toute la finesse de la plume de Balzac. Celui-ci manie en effet très bien l'ironie, cette ironie presque imperceptible parfois que l'on retrouve bien évidemment chez Flaubert. Certaines phrases sont frappantes, mordantes : "Qui dirait, mademoiselle, que cet homme, qui a l'air d'une jeune fille, est un tigre à griffes d'acier qui vous déchire une réputation comme il doit déchirer vos peignoirs quand vous tardez à les ôter ?"
On sent parfois également la hâte avec laquelle le brave Honoré a rédigé tous ses romans, dans la lourdeur stylistique de certaines phrases, des répétitions malvenues, etc... Mais on l'excuse volontiers, comme on excuse facilement une gargouille mal taillée à ceux qui ont bâti des cathédrales. Et puis ce roman n'est pas surchargé de descriptions comme c'est parfois le cas chez Balzac, les quelques passages explicatifs m'ont plutôt intéressé.
Et pourtant....
Pourtant, cette fois encore, je n'ai à peine pu lire plus de la moitié. A un certain point, lorsque Lucien vient de vendre les Marguerites précisément, tout semble s'enliser ; il exulte et se réjouit de sa vengeance, le narrateur souligne peut-être un peu trop ces sentiments ; et surtout, voilà que tous ne parlent plus que d'argent et se courbent devant lui. Voilà que la critique du journalisme se répète encore, on tourne les pages avec une moue impatiente, et il semble que ce ne sera plus que de telles pages proprement trop matérialistes jusqu'à la fin de l'ouvrage. J'ai véritablement cru avoir achevé l'intrigue, et que le reste me serait fade. Je sais bien que ce n'est pas le cas, mais je doute de pouvoir surmonter cette impression.
Un jour viendra, je l'espère, où j'aurai assez de force d'âme pour reprendre cette lecture, et boire la coupe jusqu'à la lie, du premier au dernier mot.
En attendant, je mets un 7 (si tant est qu'on puisse se permettre de noter des classiques), mais avec sursis.