Deuxième volet d'une trilogie pensée comme la grande œuvre de Dennis Lehane sur sa ville chérie Boston, Live By Night est un petit bijou de polar.
Après un premier livre d'une ambition et d'une ampleur impressionnante, Live By Night est en apparence plus court, plus simple. Lehane arrive pourtant à livrer un polar fort et habité en suivant le parcours de toute une vie, celle de Joseph, hors-la-loi autoproclamé.
Sa destinée édifiante est l'occasion pour Lehane de reprendre un à un les archétypes du roman et du film noir dans ce qu'ils ont de plus séduisant et marquant. C'est le traitement de ces codes balisés qui fait la force du roman. Ces clichés, à savoir une poignée de mafieux sanguinaires, un gangster au grand cœur, une histoire d'amour impossible, l'auteur les embrasse pour mieux recracher sa vision de l'Amérique et de son Histoire.
Boston, 1926. La prohibition bat son plein. On suit Joseph, personnage principal fascinant et tragique, un criminel doué mais naïf, le genre à s'éprendre de la nana du boss local et à en payer les pots cassés avec un grand sourire.
Marqué par une relation amour/haine complexe avec son père haut-placé dans la police, Joseph préfère se gargariser de son statut de hors-la-loi, libre qu'il se croit être de ne pas obéir aux règles du commun des mortels. Le mec a carrément les yeux qui brillent devant l'explosion d'un cargo qu'il vient de faire sauter.
La vie pour lui et ses camarades noctambules est ce spectacle pétaradant, fait de dangers, d'adrénaline et d'interdits bravés. Son credo: refuser de jouer le jeu de la société, jouir de la nuit et ses excès, être son propre roi. Cruelle illusion.
Car vivre la nuit, c'est en fait répondre à des règles encore plus exigeantes et impitoyables. C'est répondre devant des hommes sadiques, sans foi ni loi.
La vie et ses traumatismes aidant, l'homme comprendra que le pouvoir a un prix. Il ne se conquiert qu'à mesure qu'on renonce à son âme.
Le parcours de Joe s'avérera vaste, passant d'un extrême à l'autre, du jeune romantique au Kingpin régnant sur tout un empire. Les étapes: voler, manipuler, tuer. Sans trop éprouver de honte.
Après tout, il vit bien en Amérique.
Au final, Live By Night est plus qu'un bon polar. C'est un récit à la fois classique et surprenant, résolument humain. Haletant, porté par une narration ample et sûre d'elle, des rebondissements ultra-efficaces. La violence y est sèche et irrévocable. Le danger rôde à chaque bon mot, pouvant passer à tout moment à la confrontation et au carnage.
Lehane continue avec brio sa grande œuvre, Live By Night est une passionnante fresque américaine.