Le chef-d'œuvre de Bernanos est avant tout un roman profondément humain car authentiquement chrétien. Le regard porté par l'écrivain nous fait comprendre avec l'esprit et le cœur le parcours de ce jeune prêtre en chemin vers le plus grand dépouillement et le plus grand abandon que lui imposent sa solitude et sa maladie. Cette déréliction lente et inéluctable est mystérieusement transfigurée en voie de salut, sur laquelle le petit curé entraîne presque malgré lui ses paroissiens les plus farouchement éloignés de Dieu.
Et la langue splendide de Bernanos traduit à la perfection cet imperceptible rayon de lumière au milieu des ténèbres les plus épaisses. Cette sublimation de la langue française exprime à merveille l'invisible rédemption que Dieu opère au plus intime du jeune prêtre.
En véritable prophète, Bernanos répond à l'avance au « L'enfer, c'est les autres » de Sartre, en faisant dire au curé : « L'enfer, c'est de ne plus aimer. »
Voici les dernières lignes que Bernanos fait écrire au petit curé mourant :
« Il est plus facile que l'on croit de se haïr. La grâce est de s'oublier. Mais si tout orgueil était mort en nous, la grâce des grâces serait de s'aimer humblement soi-même comme n'importe lequel des membres souffrants de Jésus-Christ. »