L'empathie comme force de l'univers
Comme « la chute d’Hypérion », « l’éveil d’Endymion » introduit le point de vue d’autres personnages, en différents lieux. D’où une complexité accrue et une lecture moins aisée, d’autant qu’il faut jongler avec des informations dissiminées et parfois contradictoires avec ce qui avait été dit dans « la chute d’Hypérion ». L’auteur a-t-il voulu changer des détails de l’histoire ? Je ne saurais le dire mais en tout cas tout se tient. Un livre plus compliqué oui mais en contrepartie plus intéressant que « endymion ».
Comme c’était bien résumé au dos de couverture, c’est une partie cosmique qui se joue à plusieurs acteurs. L’Eglise, elle-même divisée en plusieurs constituantes, les êtres inconnus qui aident Enée, le Technocentre, et enfin Enée elle-même qui poursuit son objectif secret. Et secret il l’est, car dans un premier temps, Enée continue de différer les réponses aux questions qui brûlent les lecteurs, responsables de la fin un peu confuses de « la chute d’Hypérion ». . Raul semble accepte avec une patience étonnante de ne pas savoir, et l’auteur aime visiblement frustrer les lecteurs avec un personnage qui refuse d’expliquer à ses alliés pourquoi ils doivent la suivre au péril de leur vie, éludant les questions et reportant les réponses à plus tard. Il faudra donc être patient.
Après d’autres fuites à travers des mondes diverses, avec aux trousses Némés et d’autres super soldats, l’élue et ses alliés se retrouvent au monde bouddhiste T’ien Shan. La dernière partie est sur le point de se jouer, avec les Extros, les Templiers, des apparitions inattendues de personnages « d’Hypérion » et mêmes des intelligences non humaines. Un combat au nom de la vie sous toutes ses formes, contre le parasitisme du Technocentre. Et enfin les réponses aux questions tant attendues arrivent, sur sa mission, ce qu’elle va Enseignait, comment elle va renverser l’Eglise, la création du cybride John Keats, le déplacement de l’ancienne Terre et la raison de la reconstitution de divers civilisations à sa surface et d’autres encore. Toutes les pièces du puzzle seront enfin reconstituées. Excepté sur la nature du gritch, qui conserve une part de mystère.
Des révélations assez métaphysiques mais malgré tout crédibles et fort intéressantes, où il est la question de la conscience humaine, d’empathie, et ouvrant la voie à une réflexion sur l’évolution de l’humanité. L’attente valait donc le coup.
De nouveau l’on découvre des mondes exotiques : monde entièrement constitué d’atmosphère avec des violents orages et des soleils produisant de magnifiques couleurs à la surface des nuages ; des hautes montagnes aménagées par des entrelacs de ponts suspendus, de plateformes, de fils de descente et autres moyens de transports assez dangereux, avec en bas un océan de nuages d’acide mortel ; un véritable écosystème dans l’espace avec des arbres géants et des espèces vivantes se déplacent dans le vide.
Mais quelle besoin avait Dan Simmons de décrire en détail les peuples, bâtiments jusqu’au nom des sommets de T’ien Shan ?? Avec des noms asiatiques ce qui rend leur mémorisation quasiment impossible. Il doit bien y avoir quelques dizaines de pages de description…
Pourtant, malgré ses longueurs et son luxe de détails parfois rebutant, la conclusion de l’histoire, les thèmes et idées évoquées justifient l’effort. La nature du Vide qui lie, et ce que l’humanité peut accomplir en le maîtrisant, est vraiment intéressante. J’aime particulièrement l’idée que l’empathie constitue une force de l’univers, étant un moyen de contrôler la nature particulière du Vide qui lie.
Dans ce dernier tome s’achève également l’histoire d’amour entre Raul et Enée, comment Raul s’est retrouvé dans ce caisson de Shrodinger dans lequel il raconte l’histoire, et comment il s’en est sortit. Deux amants séparés à travers le temps et l’espace, s’aimant d’un amour rendu d’autant plus intense par les épreuves endurées et un ennemi puissant, trouvant la force dans les bras l’un de l’autre face à des forces supérieures.
Alors est-ce que le livre est trop long ? Oui. Mais est-ce qu’il vaut le coup ? Définitivement oui.