Je n'aurai jamais lu La Curée d'Emile Zola, si ma professeur de français ne m'avait pas obligé de le lire, sous peine de me taper une dizaine de 0 tout au long de l'année scolaire. Sinon, jamais je n'aurai lu ce bouquin, tout simplement car je n'aurai jamais (jamais) eu l'idée de lire du Zola, car c'est tout simplement vraiment (vraiment) pas mon style de roman. Voilà que c'est dit, je vais pouvoir commencer.
C'est bien écrit...
Bon, tout d'abord, l'écriture. Je ne parle pas ici de narration, de personnages, ou juste de l'histoire, mais de l'écriture de l'auteur, son style. Et il faut dire que ce livre fait honneur à la réputation de Zola. C'est bien écrit, chaque description est vraiment bien pensée et est faite pour décrire mais aussi raconter quelque chose où chaque morceau de phrase ou chaque mot sert d'une certaine manière le propos sociétal d'Emile. Ensuite, pour narrer c'est efficace, ça décrit les actions des personnages mais sans plus en calant quelques figures de style pour rendre le tout sympathique. Tout ça pour dire qu'Emile écrit très bien, on comprend tout sans y réfléchir, tout devient instinctif avec son écriture et le récit se déroule sous nos yeux, tout en se disant que c'est beau (car ça l'est vraiment beaucoup et on ne peut le nier) ; rajoutez à cela un vocabulaire riche et varié qui sublime le texte, on apprend même des mots tellement que certains se perdent au fil du temps. De plus, style d'écriture de Zola est d'autant plus impressionnant que si on analyse ses textes (je l'ai fait en cours) on se rend compte que son chaque paragraphe de chaque chapitre du roman est un véritable travail d'horloger.
... Le message est clair...
Bon, au cas où on ne le saurait pas déjà, Emile Zola, il aimait pas trop le IInd Empire, et d'ailleurs il ne se dérange pas pour le critiquer de manière acerbe en y décrivant la haute société bourgeoise de cette époque pour mieux en montrer ses travers, et plus précisément la famille Saccard où nous sont présentés les deux personnages principaux, Aristide et sa jeune femme Renée, le roman sautant habilement d'un personnage à l'autre avec une narration qui use d'analepse, de transitions et de pleins d'autres outils narratifs. Les personnages sont le point fort de cette oeuvre, ils retranscrivent la société de Paris sous le IInd Empire et tout le sel qu'Emile a pour ce régime. On nous présente donc un IInd Empire qui a transformé la ville lumière en un immense bordel où arnaques, inceste, d'anciennes affaires de viol, fraudes, remariages frauduleux, falsification d'identité, politiques antipathiques (Eugène qui veut "supprimer" son frère si il fait un faux pas à son égard) sont choses courantes et où la seule chose respectée est l'empereur. On réussit à comprendre l'époque grâce à son style dont j'ai déjà parlé mais aussi grâce à ses personnages complexes, notamment ses deux principaux et ses quelques secondaires tels que Maxime. Même si certains ne sont que des archétypes et ne servent qu'à assurer quelques fonctions narratives par ci par là comme Mignon et Charrier. C'est donc une réussite au niveau de la narration, du propos, de l'écriture et de personnages, mais...
... Mais...
On s'ennuie ferme ! Sérieusement, les oeuvres de Zola ne sont pas réputées pour leur dynamisme, et là on le comprend rien qu'en lisant les dix premières pages : les descriptions, même si elles racontent toute quelque chose et étoffe un props complexe, sont d'une longueur extrême et mettent en pause le récit à chaque fois qu'il y a lieu de décrire une chose ou un personnage, c'est-à-dire tout le long du récit. On s'ennuie ferme ! Et puis les personnages ne sont pas intéressants ; comment s'attacher à eux si ils ne sont juste que des connards ou des connasses, comme Renée qui mène une relation incestueuse juste parce qu'elle s'ennuie, ou Saccard qui ne pense qu'à se faire de l'argent, quitte à enfreindre toutes les limites du monde de la finance et éthiques ? Certes, ces personnages appuient le propos et si ils sont antipathiques, c'est pour encore plus dénigrer le IInd Empire et Napoléon III, mais quand on suit un récit, on aimerait que les personnages principaux soient attachants pour qu'on ai envie de lire la suite, et pas juste lire pour découvrir comment Emile va faire sa critique avec sa fiction (qui je le rappelle est superbement écrite). On s'ennuie ferme ! Du début jusqu'à la fin. Et si vous n'êtes pas intéressé par le fond avec ses belles narrations et descriptions auxquelles on ajoute de fabuleux personnages bien complexes et utiles sur tous les points au récit, la forme laisse à désirer. Mais pourquoi ?
... La forme est mauvaise !
Tout simplement car la manière d'écrire un roman a évolué et que les normes d'écriture de l'époque sont vieillissantes aujourd'hui (c'est normal, c'était il y a 150 ans). Par contre, pour la narration et les descriptions, ça reste du bon travail, même vu sous l'oeil d'un lecteur du XXIème siècle. En réalité, quand on s'y penche un peu, c'est le dynamisme qui manque à l'oeuvre, tout est beaucoup trop lent. Par exemple, aujourd'hui, un auteur préférera mêler des descriptions courtes avec des dialogues rapides et efficaces, en usant d'une narration simple qui use simplement de ses personnages, tout cela pour donner un rythme à l'intrigue. À cette époque, le roman a été écrit en plein naturalisme, qui a pour but de critiquer une société injuste dont Zola est le plus éminent représentant, et je suis sûr que si j'étais un fan de ce courant littéraire en 1871, j'aurais mis une note de 9, tant ce roman s'inscrit à la quasi-perfection dans le naturalisme et le représente si bien avec son écriture totalement incroyable. Mais aujourd'hui, ce roman n'est plus en phase avec les normes de notre époque, et ces personnages antipathiques à souhait, son manque affligent de dynamisme et son intrigue que je trouve ennuyeuse au possible, rendent le tout indigeste à mon humble avis et rendent La Curée de Emile Zola mauvais. Ce sera donc pour moi un 3 tant ses défauts surpassent ses qualités.