"Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement et les mots pour le dire viennent aisément" disait notre ami Nicolas Boileau. Oui, je dis notre ami, comme si nous étions une communauté, vous et moi, lecteurs nombreux et attentifs, et je dis ami comme si je le connaissais vriament ce Boileau, alors que cette citation me revient en tête comme un boomerang au moins une fois tous les dix jours, si personne ne me la ressort. Toujours est-il qu'elle trouve ici une adaptation plus que bienvenue.
Toujours est-il que Thoreau, lui, n'est pas franchement notre ami sur ce coup là.
Essai fondateur (paru en 1849 la première fois), généreux, bourré d'idées et d'anecdotes, en dépit de sa petite taille (il paraît que ce n'est pas la taille qui compte), La désobéissance civile n'est pourtant pas le texte absolu que son titre laisse augurer.
Si des concepts comme la Justice forgent la structure, rendant obligatoire sa lecture pour tout homme adulte ayant un tant soit peu d'ambition publique, rappelant les fondamentaux de l'humain comme chacun se devrait de les appliquer pour revendiquer un tel titre, le quelques pages de l'essai sont toutefois triturées, glissant d'un sujet à l'autre, puis un autre, sur un plan qui semble absent.
Désobéir, oui, mais pour faire quoi ? A quoi ? Qui ? Dans un texte sans chapitre, on nous explique que les impôts c'est le mal, que la liberté est sacré, que le meilleur état est celui qui gouverne le moins. Thoreau illustre, s'illustre, se raconte, déroule une pelote dont on ne voit pas le bout et dont on ne comprend pas forcément bien l'enjeu.
Le propos perd alors en force ce que sa brièveté lui faisait gagner. La lecture se fait laborieuse, on cherche, on se perd, on relit, on rerelit les mêmes pages et les mêmes passages sans pour autant en tirer une quelconque moëlle. Ce portrait n'est pas valable sur toute la longueur de l'essai, mais sur suffisamment de pages malgré tout pour que le plaisir de lecture, le plaisir et l'étonnement de la découverte soit teinté d'un peu de gâchis...
"Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement..." donc 6.