Pauline souriait, approuvait de la tête, car le bonheur selon elle, ne
dépendant ni des gens ni des choses, mais de la façon raisonnable dont
on s’accommodait aux choses et aux gens.
Pauline Quenu, orpheline de père et de mère, est recueillie par des cousins de son père, les Chanteau. Ces derniers, bonne petite famille bourgeoise, vivent dans un village portuaire isolé appelé ironiquement Bonneville. Monsieur n'est pas méchant pour un sou mais vit dans l'égoïsme du malade, bouffé par la goutte, Madame n'est pas méchante pour un sou (enfin pas méchante tout court !!!) mais est prête à tout par amour pour son fils, celui-ci justement n'est pas un mauvais bougre, c'est juste qu'il s'enthousiasme pour des projets d'avenir qui deviennent inévitablement foireux. Cette famille ne roule pas sur l'or, et Pauline a bénéficié d'un joli pactole comme héritage ; et Pauline ne souhaite que faire le bonheur des autres...
Un village au bord de la mer, avec les habitations des pauvres vivant près des vagues, trop près, souvent détruites par les éléments impitoyables, mais des pauvres tellement crasses et se complaisant tellement dans leur crasse la plus sordide, qu'on ne souhaite qu'une chose c'est que le monstre bleu nettoie tout cela d'un coup sec. Mais plus en haut, suffisamment à l'abri du danger maritime mais pas de la crasse, car si les apparences sont plus propres le fond est aussi sale...
Mais on a souvent aussi envie de mettre des claques à la protagoniste, tellement par sa (trop !!!) grande bonté, elle se laisse peu à peu dépouiller de tout sans la moindre résistance. Personne ne l'épargne mais elle ne s'épargne pas non plus, allant même donner jusqu'à donner l’aumône à ces salauds de pauvres qu'elle a eu la bêtise de chercher elle-même. On finit par comprendre sa philosophie de vie, sa "joie de vivre", mais on ne peut que prendre malgré tout le titre du roman que d'une manière sarcastique.
Dans le douzième roman des Rougon-Macquart, Emile Zola réussit encore une fois à croquer des personnages avec une grande vérité. On n'oubliera pas la bonté et le sens du sacrifice du personnage principal et les tourments qui ne manquent pas de l'agiter sans cesse, la peur irrationnelle qu'a Lazare de la mort, le cousin dont est amoureuse notre figure sacrificielle, la mère qui ne pouvant pas faire face à de trop lourds remords de dépouiller l'orpheline se met à la haïr. Même la chien et la chatte de la maison n'échapperont pas à l’œil aiguisé de l'auteur de L'Assommoir. Si cela n'est pas, encore une fois, la preuve que Zola était un géant de la littérature...