Dans un style sec, net et sans artifice, Yves Grevet fait entrer sa Maison dans le club déjà surpeuplé des dystopies adolescentes. Toutefois ce premier tome surnage dans l'océan de la production du genre.


Yves Grevet choisit judicieusement de commencer son roman par une initiation, celle du jeune Crassus par son ainé Méto. Cela lui permet de poser son univers, un huis-clos oppressant, viril et violent, que l'on suit à hauteur de vue d'enfants qui n'en sont presque plus. On démarre cette histoire sans en connaître ni en comprendre les enjeux et cela dure suffisamment longtemps pour frustrer le lecteur tout en distillant quelques clés de compréhension pour obtenir le cocktail parfait du page turner. En deux chapitres, le tour est joué et le lecteur est ferré.


Là où Grevet réussit son numéro d'équilibriste c'est qu'il nous épargne une exposition, pourtant topos du genre, souvent empesée ou trop démonstrative, en débutant son roman in medias res. L'immersion y est donc immédiate et d'une redoutable efficacité. Grevet pousse même le vice jusqu'à n'offrir presqu'aucune réponse aux questions qui ont pu poindre au cours de la lecture, plaçant Méto et le lecteur dans une relation de complicité fusionnelle. Dès le basculement du narrateur vers la quête de vérité, le lecteur ne peut que s'identifier à lui et finir par se poser les mêmes questions ou tout du moins s'interroger sur les mêmes sujets. Et s'il en est un qui interpelle lors de ce premier tome, c'est bien la place des femmes dans l'histoire d'Yves Grevet. Si les garçons de la maison se posent avant tout des questions anatomiques et lexicales sur le sujet, le lecteur n'a qu'une interrogation en tête, la même que Patrick Juvet : "Où sont les femmes ?" Et je dois dire que j'attends Grevet au tournant sur le sujet.


Tout en ayant hâte de lire la suite je crains toutefois que, comme souvent dans ce genre de littérature jeunesse, les explications données sur les origines de cette dystopie ne soient décevantes. Toutefois, je m'apprête à lire la suite la fleur au marque-page, séduit par l'univers et un style précis et plaisant à lire malgré une apparente froideur.

RunningJack
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le 16 févr. 2022

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RunningJack

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