Parmi les critiques qui reviennent souvent lorsqu’on parle de littérature autobiographique, il se dit qu’elle serait une littérature de bas-étage. Il y a cette idée qu’un « vrai » écrivain ne devrait pas s’abaisser à parler de lui-même. On parle alors de la littérature autobiographique comme d’une écriture dégoutante et qui devrait avoir honte d’elle-même. Bref. Les critiques les plus négatives viennent de personnes qui préjugent d’un récit comme celui d’Annie Ernaux en lui prédestinant une « place. » Celle qu’ils pensent être la bonne. Peut-être l’unique possible.
Annie Ernaux part de sa propre experience. Grâce à la figure du père, elle revient sur les enjeux de toute une classe sociale, sur ce que voulait dire vivre dans les yeux de son père. dans ses yeux, dans sa bouche et dans ses mains aussi. Le père, ses impossibilités, son petit monde, qui se déplace dans l’espace délimité de sa condition. (Je dis le père, mais je pourrais évoquer la mère aussi)
Ce qui est fabuleux dans l’écriture de l’intime, c’est qu’elle part d’une experience personnelle pour se rapprocher d’une expérience universelle, en même temps qu’elle valorise chaque experience et chaque détails comme étant singuliers. À la fin, le livre nous parle « personnellement. » Ce n’est pas que l’on se reconnaît, c’est que nous sommes reconnus.