Takeshi Kitano pour moi tu vois c'est le gars au dessus de Ryan Gosling. Y'a trois pélos qui se font éclater à coups de fusil à pompe ? Le mec reste impassible. Découper un gus au katana comme toi tu tranches ta mozza ? T'attends pas trop à autre chose qu'un oeil qui cligne, minou.
Mais voilà sa gueule, son style, ses films... Le mec dégage tout de suite une aura sympa malgré un visage inexpressif. Je me suis toujours demandé pourquoi et tu vois ben ce soir je crois que j'ai un début de réponse.
Kitano est un gosse. Un putain de sale gosse en plus. On le découvre dans cette courte biographie publiée en 1984 au Japon. Déjà niveau style d'écriture, t'imagines t'es accoudé au bar en train de boire ton Pepsi Max des familles et Kitano il boit sa petite reubié tranquilou, sauf qu'au lieu de se faire un trip alternant cacahouète/gorgée de houblon, il vient te taquiner les oreilles avec des petites anecdotes de quand il était gamin.
Le Japon d'après guerre, la famille issue d'un milieu pas du tout aisé. Le père est vieux quand naît Takeshi (50 piges), c'est un putain de loser selon les dires de son fils, doublé d'alcoolisme et qu'hésite pas à battre sa femme et sa mère de 80 balais quand il a un coup dans le nez. Il évolue dans une famille dont le patriarche croit pas du tout aux études, mais le père se défonce quand même au boulot pour permettre à ses gosses de sortir de là (après avoir éclusé 2l de saké, qu'on entame à 6h du mat' histoire de bien finir la journée). Aujourd'hui on dirait famille dysfonctionnelle, y'a dix ans j'aurai balancé que c'était des purs cassos' mais bon, t'as saisi l'idée un peu.
J'te vois venir, t'es en train de te dire que ça vire au drama direct et que ça va pleurer dans les chaumières. Ambiance Eddy Bellegueule /"moi j'ai réussi alors que je viens d'un milieu dur".
Et ben même pas ! Il s'exprime exactement comme le ferait un enfant, avec toute la naïveté possible, même en étant lucide sur la violence paternelle et l'ambiance dans laquelle il a pu grandir.
Comme dans certains de ses films, il agrémente chaque chapitre de petits dessins concoctés par lui-même, genre le gars t'explique comment son cerf-volant rafistolé avec deux bandes de papier journal s'est retrouvé éclaté dans un tas de merde, que pour lui c'est la fin des haricots et ... ZBAM ! Un dessin tout ce qu'il y a de plus innocent.
Son père rentre complètement rond à Noël et renverse la table sur laquelle réside une superbe pâtisserie achetée par la soeur ainée de Takeshi ? BOUM une illustration pleine de poésie enfantine.
Surprenant. C'est la première chose que je me suis dite. Originale quoi. J'ai fumé une clope, j'ai réfléchi à ce que je venais de lire, et puis.
En fait c'est pas si surprenant que ça venant de Takeshi Kitano, cette biographie est exactement à l'image des films qu'il a pu réalisé. T'es toujours le cul entre deux chaises, une scène de violence et dans le plan d'après t'as une putain de poésie bourrée de candeur.
On épargnera le coté un peu réac à la fin qui dit que les gosses d'aujourd'hui (de 1984 hein) ont tout et qu'après la guerre comme t'étais obligé de faire avec ce que t'avais quand tu jouais à un jeu tu le faisais durer le plus longtemps possible, même une fois cassé etc. On lui épargnera parce que franchement quand tu refermes ce texte, t'as qu'une envie ...
...c'est que Kitano devienne ton pote et qu'il t'apprenne à jouer au base-ball !
Ça se bouffe comme un ravioli badigeonné de sauce aigre douce. C'est super bon, des fois ça pique un peu... mais c'est du pur Kitano donc t'as pas du tout l'impression de t'être fait avoir.
Ya bon !