... Pour écrire de bons livres.
La preuve avec ce nouveau roman de l'ancien enfant terrible des lettres anglaises, Martin Amis.
En effet, dans La Zone d'intérêt le romancier imagine un triangle amoureux abject : le commandant d'un camp de concentration, fanatique nazi absolu, est marié à une "fraulein" national-socialiste, une aryenne débordant de sexualité mal refoulée, ardemment courtisée par un officier subalterne, le troisième larron de cette histoire sordide. Mais on a aussi droit aux atermoiements d'un sonderkommando dont on apprend dès les premières pages du livre qu'il sera fusillé d'un moment à l'autre par le commandant du camp, très désinvolte avec son esclave. Bref, il ne suffit pas d'imaginer le malaise et l'abjection pour faire de la bonne littérature, et cette fois Martin Amis est allé trop loin. Tant qu'il se cantonnait à décrire la vie insipide de blaireaux pleins aux as, comme dans son fameux Money, money tout allait bien pour lui. Il pouvait profiter des orgies londoniennes et lutiner n'importe quelle starlette accorte qui croyait avoir affaire à un génie de l'écriture du calibre de Graham Greene par exemple. Mais voilà, les jeunes romanciers spectaculaires d'hier sont devenus les has-beens de la littérature d'aujourd'hui. Alors que faut-il faire pour se raccrocher aux wagons d'une gloire éteinte passée quarante ans ? Ecrire des scénarios nullissimes comme Brett Easton Ellis à Hollywood, raconter n'importe quoi à la télé comme Ce bon vieux Houellebecq, de plus en plus gâteux avec l'âge ? Ou bien susciter le scandale, le dégoût, la suffisance de soi sale et hostile ? C'est cette dernière option qu'aura choisi Martin Amis, finalement. Et je suis bien content que ses éditeurs historiques allemands et français aient refusé de publier cette obscénité qui a pour nom La Zone d'intérêt et qui n'en suscite pas le moindre chez un potentiel lecteur.
Allons Mister Amis, reprenez-vous, parbleu, et contentez-vous d'écrire sur le monde contemporain, sans essayer d'égaler votre père, feu Kingsley Amis. Inutile d'évoquer les vieilles lunes, il y a tant à faire avec aujourd'hui avec ce monde déglingué qui est le nôtre...

Marcellien
5
Écrit par

Créée

le 30 déc. 2015

Critique lue 316 fois

Marcellien

Écrit par

Critique lue 316 fois

D'autres avis sur La Zone d'intérêt

La Zone d'intérêt
Hillja
7

Un tas de cuites

Ce roman polyphonique est une plongée absurde dans la banalité de la violence, telle qu'elle est perçue par des nazis en quête d'amour et par des juifs en quête de... de rien. C'est que les...

le 3 juil. 2024

1 j'aime

La Zone d'intérêt
Cinephile-doux
3

L'horreur et l'ennui

artin Amis a déjà écrit un roman sur la barbarie nazie avec La flèche du temps, l'histoire d'un médecin à Auschwitz, contée à rebours avec une virtuosité qui diluait la monstruosité de ses actes tout...

le 4 janv. 2017

1 j'aime

La Zone d'intérêt
dahlem
6

La zone d'intérêt ou le quotidien des camps de la mort

En guise d’introduction, il n’est pas inutile de rappeler que la parution de ce vingtième roman de l’un des romanciers Anglais les plus adulés dans son pays a failli ne pas se faire, Gallimard – son...

le 15 janv. 2016

1 j'aime

Du même critique

Tant qu'il y aura des hommes
Marcellien
9

Une merveille de film !

Cela faisait bien longtemps que je n'avais pas revu ce film de l'âge d'or hollywoodien. Alors revoir les beaux visages de Deborah Kerr, de Burt Lancaster, de Monty Clift et de Frank Sinatra fut à...

le 17 sept. 2014

9 j'aime

11

Arbitrage
Marcellien
7

Critique de Arbitrage par Marcellien

Avec la crise des sub-primes en 2008, partie des Etats-Unis puis submergeant le monde financier peu à peu aux quatre coins de la planète, les vieilles terreurs du passé refirent surface. La crise...

le 19 juil. 2013

5 j'aime

Le Fanfaron
Marcellien
10

Un bijou de comédie italienne...

...Qui n'écarte pas le drame pourtant. Mais, enfin, rouler dans une Lancia décapotable en compagnie de Vittorio Gassmann, le Prince du cinéma transalpin moderne, et de Jean-Luis Trintignant, un amour...

le 13 mai 2014

4 j'aime