Un écrivain, ça parle le mieux de ce que ça connait; ça a les préoccupations de son âge aussi. Pas étonnant qu'avec l'âge venant, ce bon vieux Stephen pense de plus en plus à ce qui l'attend. Il regarde à l'horizon, et il est pas dupe le roi de l'horreur, il sait que le grand barrage routier est bientôt en vue: celui qui le forcera à stopper le moteur de la grosse bécane qu'il chevauche depuis quarante ans. Mais comptez pas sur lui pour décélérer et se ranger gentiment sur le bas coté. Pas son style. Non, Stephen en voyant la fin de la route qui approche, il remet un petit coup d'accélérateur. Il s’arrêtera uniquement quand le moteur cassera, et tant qu'il aura de l'essence pour l'alimenter il continuera inlassablement à arpenter la route des mauvais rêves et à nous monter ce qu'il voit sur le bas coté pendant son voyage.

La mort est présente comme fil conducteur de ce recueil de nouvelles, et seule trois d'entre elles (Morale, Le petit Dieu vert de l'agonie, et feux d'artifices imbibés) n'invitent pas la faucheuse à venir fourrer son nez entre ses pages.
On se retrouve donc avec un livre encore un fois assez noir. Moins que Full Dark, No Stars, assurément, mais le recueil semble être une réflexion permanente sur la mortalité. Bien sûr, c'est pas une première pour King, et même lorsqu'il était jeune, le genre dans lequel il écrit aurait comme une tendance à faire de la mort un personnage permanent de son œuvre. Pourtant, ce personnage n'a jamais pris autant de place au sein d'un de ses recueil de nouvelles. Tout n'est pas d'une qualité flamboyante, et je dois bien dire que c'est l'un de ses recueil que j'aime le moins, mais comme à son habitude, le maitre de Bangor sait toujours y faire, et on sent même qu'il en a encore sous la pédale; comme s' il attendait encore un peu avant de pousser les manettes à fond pour un dernier baroud d'honneur, pour monter que le moteur a des ressources qui sont encore insoupçonnées.

Mais trêve de bavardage, et laissez moi vous faire faire un petit tour d'horizon de ce qu'on rencontre au bord de la route des mauvais rêves que King nous dévoile ici.

Miles 81
Une histoire de voiture maléfique, encore, mais qui n'arrive pas à la hauteur d'autres de ses œuvres traitant du sujet, comme Christine, ou le très sous-estimé Roadmaster. Assez décevant donc (5/10)

Premium Harmony
Récit simple ou la mort s'invite en surprise. Comme toujours, c'est par la vie que King parvient à insuffler à ses personnages et à leur quotidien que la nouvelle fonctionne. Rien de très surprenant, mais pas désagréable (6,5/10)

Batman et Robin ont un accrochage
Comme la précédente, aucun élément fantastique dans celle-ci. Elle est pourtant bien plus réussie, peut-être parce qu'elle parle aussi de la vieillesse, et du déclin qu'elle entraine. Les personnages sont comme toujours attachants, et je crois qu'on a ici l'une des meilleurs nouvelles du recueil. (7,5/10)

La Dune
Un vieil homme raconte l'évènement le plus étrange qui lui soit arrivé à son notaire avant de refaire son testament. Une nouvelle fantastique assez réussie et assez cruelle dans son dénouement qui fait plus penser à ce que l'on trouve dans des recueils comme Brume ou Night Shift. (7/10)

Sale Gosse
Un condamné dans le couloir de la mort raconte comment il en est arrivé là. Ici encore, du King classique, agréable et assez pervers. (7/10)

Une Mort
Une nouvelle de type western qui traite du doute concernant l'innocence ou la culpabilité d'un homme. Pas mal, mais manque un petit truc (6,5/10)

Église d'ossement
Poème au titre explicite.

Morale
Petit conte enfonçant à nouveau le clou sur le fait que l'argent ne fait pas le bonheur. Efficace, et malsain (7/10)

Après-vie
Quel sens à la vie? Et si tout n'était que recommencement perpétuel sans qu'aucun changements ne soient possible? Et si nous étions sans cesse condamné aux même erreurs? (6,5/10)

Ur
Et si on pouvait lire les romans d'auteurs ayant eu des vies différentes dans des univers parallèles? La tour sombre s'invite une fois de plus au bal dans cette nouvelle sur l'infinité des possibles (7/10)

Herman Wouk est toujours en vie
Stephen King est toujours en vie. Une histoire simple ou l'écriture et la poésie s’effacent face à la réalité. La force de vie contre la force de mort. Une nouvelle désarmante de simplicité, mais qui fonctionne encore une fois grâce au talent de King pour créer des personnages qui semblent vivants. (7,5/10)

A la dure
La mort et son acceptation. Nouvelle très noire mais captivante (7/10)

Billy Barrage
Une nouvelle servant surtout d'alibi pour que King transmette sa passion du Baseball. Sympathique néanmoins (6,5/10)

Mister Yummi
La mort vient nous cueillir sous ses plus beaux atours. Une nouvelle qui parle également de l'hécatombe occasionnée par le SIDA dans les années 80. (6,5/10)

Tommi
Un hommage sous forme de poème.

Le petit Dieu vert de l'agonie
Ou King parle de le douleur, et transpose ce qu'il a ressenti lors de son accident dans un récit de fiction (6,5/10)

Ce bus est un autre monde
Une nouvelle qui parle du fait que nous vivons chacun dans notre petit univers. Assez dérangeante dans sa conclusion (6,5/10)

Nécro
Sorte de variation de Death Note à la sauce King. (7/10)

Feux d’artifices imbibés
La voix du narrateur fait beaucoup pour que cette nouvelle sur un concours d’ego qui tourne mal sorte de l'anodin. King reprend ici la technique utilisée dans Dolores Claiborne (que je vous conseille fortement) (6,5/10)

Tonnerre d'été
King s'y entend toujours pour nous faire vivre la fin du monde comme si nous y étions. Une des meilleure du recueil (7,5/10)

Dans l’ensemble, ce n'est pas le meilleur recueil de King, mais comme je le connais bien, je sens qu'il nous prépare un départ en beauté, un œuvre testament qui nous assénera un gros coup de maillet sur le sommet du crâne. Parce que même si la route est barrée, et que le tour sur le bolide doit s'achever d'une manière ou d'une autre, ne comptez pas sur lui pour ralentir. Il continuera jusqu'à ce que ce qui lui sert de bécane explose et que le moteur rende l'âme en brandissant son poing en l'air et en poussant un cris de guerre.

Mais en attendant comme il le dit lui même: "Comme je suis content qu'on soit encore là, toi et moi! C'est cool n'est-ce pas?" Ouais Stephen, c'est cool.

Samu-L
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le 12 juil. 2023

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Samu-L

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