Le Démon de la colline aux loups

“Cela part d'un besoin de me laver intérieurement de toutes ces histoires, ces souffrances, ce flot de souvenirs lourds, accumulés à suivre des procès d'assises. Il n'y avait que la fiction qui pouvait m'aider à incarner ce concentré d'humanité”, témoigne Dimitri Rouchon-Borie. Après 10 ans de chroniques judiciaires, le journaliste ouvre la Rentrée Littéraire 2021 des Éditions le Tripode avec son premier roman : “Le Démon de la Colline aux Loups”.

Et le pari est réussi. le Démon de la Colline aux Loups livre un texte étourdissant d'une violence inouïe, un flot ininterrompu d'images et d'émotions. À travers le personnage de Duke et de sa descente aux enfers - ou plutôt de sa naissance en enfer, Dimitri Rouchon-Borie pose la question du libre arbitre : pouvons-nous réellement être tenus responsables du mal que nous faisons ?

On découvre l'enfance traumatisante de Duke, la naissance de sa conscience par l'écriture, et sa lente évolution du stade d'animal à celui d'humain. Maltraité et affamé par ses parents, violé par son père, l'auteur ne nous épargne aucun détail sur le quotidien d'un être humain abandonné par la vie. Chaque mot, chaque phrase, chaque page nous entraîne un peu plus loin dans le tourbillon de violences subies par le narrateur, qui raconte son histoire depuis la prison où il est enfermé pour avoir pris sa vengeance sur la vie.

Si je devais décrire ce roman en un mot, ce serait le dégoût. le dégoût d'une enfance salie par des parents inhumains - le terme d'abusif n'est pas assez fort ici. le dégoût d'une suite d'événements accablant une âme originellement pure et pervertie par la vie. J'ai eu des hauts le coeur tout au long de la lecture. Et pourtant, c'est incontestablement un des meilleurs livres que j'ai lu depuis le début de l'année.

L'auteur n'utilise presque aucune ponctuation, un langage simple qui traduit le “parlement” de Duke, nous entraînant dans un souffle infini, dans un monde où tout s'oppose. L'histoire de Duke, à la fois coupable et victime, nous donne envie d'hurler, de pleurer, de protéger. Protéger nos enfants, ceux des autres, tout faire pour ne jamais voir cette fiction devenir réalité. Elle fait ressortir en nous toute notre humanité, notre devoir citoyen de préserver les plus démunis.

“Le Démon de la Colline aux Loups” est le premier roman des Éditions le Tripode que je lis. Une découverte bouleversante, qui malgré les nuits blanches qu'elle a provoquée, me donne envie d'explorer d'autres ouvrages de la maison.