J'arrive des années après la bagarre, au moment où le battage autour de l'univers du sorceleur est plus intense que jamais. J'ai déjà fait les trois jeux. Et je me suis dit que pour rester encore un peu en compagnie de Geralt, ça pourrait valoir le coup de me pencher sur les ouvrages.


Deux trucs m'ont fait tiquer dans le style d'écriture. La première chose a peut-être à voir avec le fait qu'il s'agisse ici d'un recueil de nouvelles et qu'on risque forcément, en les lisant toutes d'affilée de repérer plus aisément des redondances. On verra en lisant les suites si c'est un problème récurrent, mais pour le moment disons juste que certaines formulations de phrase, en particulier "on eut pas le temps de savoir ce que...parce qu'il fut interrompu par...", sont utilisées au moins une fois, si ce n'est deux dans chaque nouvelle. Le recueil en compte six plus une histoire continue qui se cale entre chaque.
L'autre élément est une manière bien étrange de délivrer les dialogues et pour cette remarque, je ne sais pas si cela a à voir avec la manière dont on écrit les dialogue en polonais qui se traduirait mal en français. Toujours est-il qu'il n'y a pratiquement pas d'utilisation de "dit-il/elle" et le plus souvent les dialogues, assez longs, ressemblent à des retranscriptions directes d'une scène de film, sans précision formelle de ce que font les acteurs en prononçant les mots. Au début, c'est extrêmement étrange d'avoir un personnage qui enchaîne questions et réponses à lui-même, d'autant plus que l'auteur ne fait donc pas d'effort pour contextualiser ces réponses, ne serait-ce que par des points de suspension qui signifierait qu'il n'obtient pas de réponse de la part de son interlocuteur et continue donc sur sa lancée. À terme, on finit par comprendre le rythme avec lequel on doit lire ces passages, en s'appuyant sur la manière dont les personnages sont décrit avant et après; il reste cependant assez bizarre de lire toutes ces phrases enchaînées comme si le personnage faisait un slam, avant de se rendre compte qu'on aurait du poser à tel ou tel endroit.


Ces deux points formels passés, j'ai bien entendu été conquis. C'est aussi le "problème" d'avoir déjà un pied dans l'univers; à moins que le travail de transcription en version ludique de CD Projekt Red ait été une complète trahison de l'oeuvre originale, je ne pouvais qu'aimer les personnages, les aventures, l'attachement aux détails...Là où Sapkowski est plutôt costaud, c'est dans l'exposition de son univers qui passent tout autant par les dialogues et la manière dont ils se déroulent (sans parler du tout leur forme pour le coup) que dans les descriptions nombreuses et assez riches pour faire saisir l'importance ou la futilité de telle ou telle chose, tout en ne se montrant pas trop envahissantes. Et pour ce qui est de ce qu'elles décrivent, j'adore que le suspens de ces nouvelles soit tout autant sur intertextualité (le fait d'essayer de deviner à quel conte on fait référence) que sur la classique enquête. Il y a un enjeu pour Geralt comme pour le lecteur qu'on trouve également dans les jeux. Ce moment où, à une page, on se dit: "Ah mais c'est la Belle et la Bête en fait!" et quinze pages plus loin on est également surpris, mais simplement par la tournure des événements.


Si je ne comprends absolument rien à la chronologie de parution des textes originaux de la saga de Sapkowski (et l'éditeur a du se rendre compte du bordel en les renommant "tome 1", "tome 2" etc.) une chose est sûre, ce "Dernier Vœu" est quoi qu'il en soit un bon démarrage que j'ai trouvé étonnamment encore plus savoureux en connaissant les jeux. Alors que je partais en me disant que les jeux m'avaient suffisamment spoilé pour enlever de l'intérêt aux intrigues, c'est assez génial de découvrir les origines de certains personnages ou de se rendre compte à mi-chemin d'une intrigue que c'est d'eux dont il s'agit, mais qu'ils ne sont pas désignés par le même nom. En bref, un lecture plus que recommandé pour les fans, et accessoirement pour les curieux d'intertextualité qui ne soit pas de la "simple" parodie.

seblecaribou
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le 3 juin 2016

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seblecaribou

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