C'est un roman plutôt déroutant que Dostoïevski proposa en 1846. D'ailleurs, il fut si mal accueilli par la critique à sa sortie que l'auteur en proposera une nouvelle version, 15 ans plus tard.
Je ne serai pas aussi tranchée que le furent les lecteurs de l'époque, mais il faut bien avouer que Dostoïevski ne nous facilite pas la tâche. Dès le début du roman, on découvre un personnage principal mal assuré, à la diction hésitante, ce qui rend la narration peu fluide. Les premiers pas de Monsieur Goliadkine ne sont en effet pas facile à suivre, mais on découvrira peu à peu que l'auteur lui donne bien plus qu'un rôle de timide maladif à jouer.
Nous assistons à l'apparition soudaine de Monsieur Goliadkine-cadet, jumeau de notre personnage principal par son physique, sa profession, son nom, mais certainement pas par son caractère. Notre Goliadkine se fera pour ainsi dire voler la vedette par... lui-même. Il deviendra source de moqueries, se verra bannir des déjeuners mondains, et passera pour un véritable idiot ne sachant plus ce qu'il fait lorsqu'on lui annonce une consommation gargantuesque de pâtés au restaurant, alors que c'est son double diabolique qui s'empiffre à l'autre bout de la salle, lui laissant le soin de payer l'addition.
Souffre-t-il de folie, ou bien est-il déstabilisé par la simple arrivée d'un homonyme dans son quotidien plutôt routinier ?
Difficile de croire que son cadet ne lui veut aucun mal.
Son propre reflet dans le miroir lui devient étranger, et c'est comme un véritable ennemi qu'il considèrera le nouvel arrivant tout au long de l'intrigue.
Entre folie et apparition fantastique, je pensais avoir le fin mot de l'histoire au moment du dénouement du roman, mais celui-ci reste en fait libre d'interprétation.
J'ai beaucoup aimé ce Dostoïevski, pas évident à aborder mais auquel je suis restée accrochée jusqu'à l'avoir terminé.