« Le Loup des steppes » est un roman court de l’auteur allemand Herman Hesse. Ecrit à la première personne, il s’agit de l’histoire de l’autoproclamé "Loup des steppes", Harry Haller, sur une période de quelques mois.
Haller est un homme plein de contrastes qui se sent curieusement mal à l’aise avec ses contemporains. D’origine bourgeoise, homme d’une grande érudition, Haller méprise pourtant ses homologues. Porté sur la grande musique et le grand art, il est plein de dédain pour les tentatives qu’il estime mesquines des bourgeois de s’y intéresser, jugeant leurs motivations insincères et leur dilettantisme inapproprié. Plus que tout autre chose, Haller déteste les conventions sociales inhérentes au milieu dont il est issu, haïssant les faux-semblants, la politesse hypocrite et renâclant à feindre de l’intérêt pour ses semblables.
Pourtant, Haller demeure, malgré lui, profondément attaché au milieu bourgeois dont il apprécie le confort douillet et la facilité. Rien ne bat un séjour prolongé dans une vieille pension de famille, où la bonne odeur de mets gourmets et la chaleur accueillante de murs protecteurs forment un cocon auquel il est difficile de résister.
Bien conscient de sa propre incohérence, Haller est persuadé d’être une sorte d’être dual aux personnalités diamétralement opposées. D’un côté, il est toujours le bourgeois qu’il est né, et n’aime rien tant que se fondre dans le milieu. De l’autre, il s’imagine en véritable "loup des steppes", prédateur cynique et solitaire qui n’aspire qu’à une vie de liberté, dénuée de toute contingence de société, loin de ces hommes et femmes qu’il exècre.
Le livre s’attache à creuser la personnalité d’Harry Haller, d’abord en tentant de l’expliciter via un "traité du loup des steppes", puis en introduisant le personnage d’Hermine, une femme qui semble instinctivement connaître Haller et ses aspirations.
Cette deuxième partie constitue le cœur de l’ouvrage et possède un intérêt double. Sur le fond, d’abord, Hesse y développe un mode de vie résolument optimiste. Fondé sur un principe de "carpe diem", il fait de Haller un fêtard, qui apprend à apprécier les choses simples de la vie et trouve une alternative à son existence ascétique d’érudit en vivant par et pour les plaisirs de l’existence. Plus intéressant encore que la réflexion, qui demeure assez maigre et classique, est la forme choisie par Hesse pour conter l’histoire. Le texte, très court, dégage une vitalité qui le rend très agréable à lire. D’abord récit réaliste, il se pare ensuite de teintes plus oniriques, quasi fantastiques, qui dépeignent un univers fascinant.
« Le Loup des steppes » est une lecture passionnante, prenante, qui propose une réflexion intéressante, mais n’en oublie pas, chose plus importante encore, de raconter une histoire.