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Le narratueur
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C'est selon moi le roman le plus abouti d'Agatha Christie (avec "Dix petits nègres"). Elle accomplit un tour de force en égarant le lecteur pour mieux le conduire à l'infarctus lorsque le coupable est confondu par Hercule Poirot (je viens de réaliser que le prénom et le nom de ce héros de nationalité belge constituent quasiment un oxymore).
Comparons en quelques lignes les stratégies d'Agatha Christie et de Conan Doyle :
Agatha Christie s'est dotée d'un enquêteur, attentif à son apparence, soigné, mais plutôt modeste. C'est un fin limier évidemment, dont on ignore la sexualité et qui semble quelqu'un de raisonnable dans son quotidien.
Conan Doyle a opté pour un personnage haut en couleurs, Sherlock Holmes, cocaïnomane, (précisons quand même qu'à l'époque, la cocaïne faisait figure de panacée) orgueilleux, au grand pouvoir de déduction et menant une existence fantaisiste pour ne pas dire dissolue.
Mais la principale différence est la suivante :
Agatha Christie distille habilement tous les indices au lecteur qui, du coup, est passablement irrité de ne pas avoir l'acuité intellectuelle d'Hercule Poirot car, comme ce dernier, il possédait tous les éléments pour découvrir le coupable.
Conan Doyle choisit de révéler, au cours de l'enquête, les déductions de son héros, et explique seulement après comment il y parvient.
Deux approches donc très différentes...