A mes yeux Soljenitsyne est l'héritier de Tolstoï. Son pavillon des cancéreux est à l'instar de guerre et paix un roman monde dans lequel on ne cesse à chaque lecture d'emprunter un chemin différent. Lorsque jeune lycéen dans les années 80 je l'ai lu pour la première fois j'ai été évidemment intéressé par la dimension documentaire de l'histoire, et la dimension contradictoire des protagonistes faisait écho aux questionnements politiques que je me posais. Les histoires d'amour esquissé, contrarié, avorté m'avait également touché. Quand 25 ans plus tard j'ai replongé dedans j'ai rencontré une exploration de la nature humaine. Comment un groupe d'hommes et de femmes aussi qui face à la perspective concrète palpable de la mort s'interrogent et se questionnent sur le sens de la vie. Sur ce qu'ils ont fait de ce trop bref passage sur terre. Peu importe que depuis l'URSS ait disparu et que le monde ait singulièrement changé, je me dis que le contexte historico-social de cet hôpital aux confins du monde soviétique n'est que le cadre d'une interrogation humaine universelle, d'un récit polyphonique d’existences en quête de sens.