Pas de quoi fouetter un chat
Au fil des avis laissés ici et là à propos de ce bouquin, on alterne entre la critique dithyrambique et la démolition totale et sans nuance.
Sans doute faut-il voir dans ce phénomène le talent du polémiste dont le rôle, gardons-le à l'esprit, est de cliver comme on dit de nos jours.
Car le boulot de Zemmour est bien celui de polémiste. Il n'est ni philosophe, ni économiste, ni historien, ni politicien. Son rôle, et il le joue admirablement, est de repérer des lignes de fracture et d'y verser une bonne dose de poil à gratter.
Ça marche d'abord parce que Zemmour a du style, de la culture, un grand sens de la formule et du grandiloquent, quitte à parfois en faire trop dans les envolées lyriques.
Ça marche aussi parce que Zemmour n'hésite pas à violer sans tendresse les tabous de la société française sur l'immigration, le féminisme, l'islam ou Vichy.
Ça marche surtout parce qu'il est le seul bonhomme d'envergure nationale à le faire et qu'il apporte un vent de fraîcheur bien appréciable sur les mornes plaines de la pensée unique.
Mais pour autant, en dehors du petit parfum de transgression que procure la lecture du suicide français, il n'y a pas là de quoi sauter au plafond ou se rouler par terre en hurlant et s'arrachant les cheveux.
L'essentiel du propos n'est pas nouveau et les thèses de Zemmour sont bien connues pour avoir été exposées et répétées sur tous les plateaux TV de France et de Navarre.
Quant au propos en lui-même, il comporte un nombre non négligeable de conneries, tout particulièrement sur le terrain économique. Qu'il s'agisse du délire navrant sur la (trop) fameuse loi de 1973, du (trop) méchant libéralisme qui corrompt tout, de la nostalgie du colbertisme, du protectionnisme, de l'État stratège et de son plan calcul mais aussi de son culte d'un l'État omnipotent guidé par un chef suprême au pont d'Arcole, on cumule beaucoup de fantasmes, de théories battues en brèche depuis 150 ans et de rêves romantiques pour obtenir quelque chose de solide.
Le livre est donc sympa parce qu'il sent le souffre et qu'il titille la fibre patriotique mais il passe, par aveuglement, à côté de bien des problèmes à l'origine des difficultés françaises.