Contrairement aux nombreux romans d'Agatha Christie dont Hercule Poirot est le héros, au sein desquels le célèbre détective belge à moustache apparaît omniprésent, les récits consacrés à Miss Marple ont parfois tendance à n'offrir qu'un rôle mineur à la vieille demoiselle anglaise.
Ce procédé atteint son paroxysme avec "Le train de 16H50", où notre vénérable vieille fille, à la santé de plus en plus vacillante, se contente d'une poignée d'apparitions en arrière-plan, distillant simplement quelques conseils avisés à l'inspecteur Craddock, et proposant une ou deux pistes de réflexion sibyllines à son "bras armé" au cours de cette enquête, l'énergique et futée Miss Eyelessborrow.
A l'initiative de Miss Marple, cette dernière se fait embaucher comme gouvernante dans la famille Crackenthorpe, afin de pouvoir enquêter discrètement dans cette maison où un cadavre a été découvert, sans que personne ne soit en mesure d'identifier la jeune femme assassinée.
Peu de temps auparavant, une voyageuse a justement assisté à un meurtre dans des conditions improbables, à l'instant précis où deux trains se croisaient : pourtant, aucun corps n'était retrouvé à l'issue de ce témoignage.
Pour un esprit aussi affuté que celui de Jane Marple, le lien apparaît évident entre ces deux évènements, et c'est le début d'une nouvelle enquête, en vue de débusquer l'assassin qui rôde dans l'entourage des Crackenthorpe, aux relations familiales rendues exécrables par une succession complexe, source de vives jalousies.
Si "4.50 from Paddington" fait partie des romans les plus connus parmi les douze récits qui mettent en scène Miss Marple (avec notamment une adaptation ciné en 1962), ce polar sympathique mais un peu léger ne fait pas partie des meilleures réussites de la Reine du Crime.
Il s'agit d'un whodunit classique, vite lu et vite oublié, qui souffre du manque d'épaisseur de ses personnages, trop brièvement caractérisés. On ne s'attache guère à ces protagonistes archétypaux, d'autant que certaines facilités viennent ternir l'ensemble, et que le regard critique de l'auteure sur la société anglaise reste ici assez superficiel.
Reste toutefois le plaisir de la lecture, et la quête ludique de démasquer le coupable avant la fin, bonheurs incontournables chez Agatha Christie, qui ont fait de moi un de ses fans depuis ma plus tendre enfance.