Première rencontre avec Alphonse de Lamartine, celui qui faisait se pâmer dans leurs boudoirs les dames de la bonne société et les bourgeoises de la première moitié du XIXème siècle. Chantre du romantisme français, Lamartine traîne après lui une belle réputation de poète et après la lecture de "Graziella", je confirme qu'elle est bien méritée.
A la fois roman d'amour, long poème figuratif célébrant les charmes de la baie de Naples et récit autobiographique, "Graziella" narre le premier amour de jeunesse de l'auteur pour une jeune corailleuse, fille d'humbles pêcheurs.
Comme tout jeune nanti de l'époque, le narrateur séjourne en Italie plus par désœuvrement que par apprentissage, déjà atteint dans ses vertes années du fameux "Mal du Siècle". Après Rome, le voici à Naples en compagnie d'un ami avec lequel il s'essaie par dilettantisme au métier de pêcheur. Au fil du temps, la beauté sauvage et brute de Graziella, la grâce inconsciente de ses gestes adolescents, la pureté et l'innocence qui se dégagent de son amour filial et fraternel pour les membres de sa famille, touchent profondément notre héros au point que ses sentiments, tout comme ceux de la jeune fille, prennent une autre tournure.
Je salue pour commencer la beauté de la plume. Le roman est court mais particulièrement dense ; chaque description est ciselée tel un joyau. Pour qui aime comme moi passionnément l'Italie, il y a de quoi s'enchanter et se dépayser complètement au spectacle du littoral napolitain, à la fois vivant par ses traditions folkloriques, et figé dans la beauté extatique de ses paysages, sublimés par une mer merveilleuse.
Le style de Lamartine est profondément poétique et bucolique et il m'est arrivé de relire certains paragraphes à voix haute pour le seul plaisir de savourer la musicalité des mots qui s'enchaînent avec autant d'art que de naturel. Mais au-delà de l'écriture, il y a également les personnages qui, davantage que la trame narrative assez classique, deviennent familiers, intimes et finalement chers au lecteur. C'est dans cet attachement que s'épanouit le drame qui lie ces deux jeunes êtres que tout oppose socialement mais qui avaient une relation à vivre, dans une sorte de mirage à la "Paul et Virginie".
Une très belle aventure littéraire dans laquelle la beauté originelle du monde s'associe à la chasteté de sentiments vrais.