C'est avec une insolente faconde que Salman Rushdie nous invite dans un univers aux allures mythologiques dans lequel il retrace l'histoire de l'Inde du XXe siècle à travers une dynastie marquée d'un grand nez. Ce récit aux contours épiques et merveilleux, il nous le fait aimer jusqu'à plus soif : œuvre totale dans laquelle tous les ressorts narratifs existants ont l'air d'être réunis par un narrateur tout-puissant bonimenteur et fabuliste, Midnight Children nous fait adhérer à tous les possibles fictionnels aveuglement, grâce à une inventivité langagière rare et un humour intarissable autant qu'acerbe qui irrigue l’œuvre du début à la fin, quelle que soit la gravité des événements contés. J'aurai rarement vu un auteur jouer autant le jeu pervers de la fiction et cet excès procure une jubilation immédiate car l'on se dit que tout est envisageable, les limites du vraisemblable étant repoussées de chapitre en chapitre. Il a renoué avec une veine romanesque ambitieuse, et je reste encore sous le choc de cette prouesse narrative à laquelle s’est livré Rushdie dans Midnight Children.