J'ai lu à quelque part que la grandeur des gens se mesure aux petits détails. Je l'approuve de bon coeur et ajouterait même que ce sont les petits détails qui font les grandes oeuvres. A ce titre, il est souvent intéressant de lire la correspondance de certains auteurs et d'y découvrir le même génie qui inonde leurs livres. Car l'auteur de génie repousse, par son talent naturel ou par sa rigueur, plus respectable encore, toute médiocrité, faute de goût ou faiblesse de style. Evidemment, il ne s'agit par de déifier l'homme. D'aucun n'est à l'abri d'une exaspération, d'un manque d'inspiration ou d'une urgence. L'indulgence n'est une qualité que lorsque celui qui la mobilise est rigoureux. L'important est que l'auteur de génie ne considère aucune lettre écrite de sa main comme un détail et c'est sur cette base que le génie se construit.
Je semble insister mais pour contextualiser, je me suis lancé dans ce petit ouvrage acheté par hasard dans une charmante "maison du livre" à l'inlassable litanie d'un proche m'évoquant le génie de monsieur Apollinaire. C'est donc candide et de bonne foi que j'ai découvert ce détail de l'oeuvre d'Apollinaire.
Le problème est qu'Apollinaire semble, lui aussi, avoir considéré ce texte comme un détail de son oeuvre.
Le récit parvient à faire semblant de bien commencer, avec la découverte d'une nudité suite à la chute dans les escaliers de la soeur du principal protagoniste. Voir le caractère libidineux de notre personnage prendre le dessus face à l'urgence de l'accident m'a paru ouvrir une question intéressante et ô combien rarement discutée : la place du désir.
Malheureusement, cette réflexion disparait au profit d'une simple exhibition quelque peu malsaine. Après plusieurs pages alternant entre pédophilie, inceste, description de menstruations, urophilie, j'ai opté pour une lecture critique du roman pornographique de la part d'Apollinaire. Le style n'y était pas, mais au moins, le fond du texte aurait eu un quelconque intérêt en terme de réception et d'attentes du lecteur.
J'aurais pu me satisfaire de cette interprétation si le livre n'offrait pas aussi des descriptions pornographiques tout à fait banales, sans saletés, sans dégoût, avec toujours ce style, le plus direct, sans fioriture, ôtant tout érotisme aux actes décrits. Le résultat mêle alors des scènes de tous genres et n'offre qu'une lecture anecdotique à celui qui aura eu le malheur de s'intéresser aux détails de l'oeuvre d'Apollinaire.