"Car j'ai de chaque chose extrait la quintessence / Tu m'as donné ta boue et j'en ai fait de l'or"
Les Fleurs du Mal, pour moi, c'est avant tout deux livres. Le premier, un vieux bouquin à la couverture rouge et doré, petit trésor découvert dans la bibliothèque de ma grand mère il y a des années, aux pages si fines qu'on retient son souffle en les tournant, de peur de les déchirer. C'est un livre sacré que j'ose à peine ouvrir, qui trône fièrement sur la première étagère de ma bibliothèque depuis près de dix ans maintenant. C'est ma première rencontre avec la poésie, que je lisais avec émerveillement, admirant la beauté des vers sans vraiment en comprendre le sens. Puis il y a ce second livre, une édition plus récente, aux pages cornées, annoté, gribouillé, avec des passages surlignés, usé d'avoir été trimballé de partout, au fond de mon sac. Celui-là n'a pas sa place sur ma bibliothèque : c'est mon livre de chevet, mon compagnon de voyage, celui qui m'accompagne où que j'aille, juste au cas où l'envie me prendrait d'en lire quelques vers.
Les Fleurs du Mal, c'est un recueil clef de l'histoire de la poésie française, une œuvre centrale et à part, cela je l'ai appris plus tard. J'ai eu le plaisir d'étudier certains poèmes au lycée, et d'apporter un nouvel éclairage à ma lecture personnelle. J'ai découvert de nouveaux poèmes, surligné de nouvelles pages, retenu de nouveaux vers. J'ai grandi, et chaque époque de ma vie a été accompagnée par un poème. Gamine, j'apprenais "Le Chat" par cœur et le récitait à qui voulait bien l'entendre, puis plus tard, je m'initiais vraiment à la Poésie, et accrochait symboliquement au dessus de mon bureau une copie de "l'Albatros". Et ainsi de suite...
Les Fleurs du Mal, c'est un voyage qu'on entreprend sans s'en apercevoir, c'est ces vers étourdissants qui nous entraînent dans un monde merveilleux où chaque mot est un carrefour s'ouvrant sur des milliers de routes pavées d'or. C'est un rêve éveillé, qui se lit d'une traite, ou par petits morceaux amoureusement choisis, qui se goûte à voix haute, ou bien en silence, qui se découvre en solitaire ou qui se partage entre amis. C'est un dur retour à la réalité, car il faut bien refermer le livre. Jusqu'à la prochaine fois.
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.