J'ai littéralement été assommée par "Les Frères Karamazov", le dernier roman de Dostoïevski, souvent considéré comme son plus abouti parce que sans doute son plus personnel.
Adolescente, j'avais tenté cette découverte mais j'avais abandonné assez vite, pas assez mature, pas assez prête. A quarante ans bien dépassés, je me suis dit qu'il fallait que je retente cette aventure, ayant apprécié bon nombre d'autres romans de l'auteur.
Je rappelle que ma notation ne reflète jamais la qualité intrinsèque d'une œuvre mais mon ressenti de lecture. Ceci étant dit, je me sens plus libre d'exprimer ce qui m'a pleinement empêché d'apprécier ma lecture. Au-delà d'un style vraiment magnifique et d'une écriture brillante, la construction narrative est surprenante, avec l'intervention régulière du narrateur qu'on aurait envie d'associer à l'auteur.
Dimitri, Ivan et Alexeï ont beau être frères, ils sont tous trois très différents (qui prétend d'ailleurs que des frères doivent se ressembler ?), avec pour dénominateur commun un père répugnant, immoral, provocateur, égoïste (tel que fut le père de l'auteur). Leur tempérament est aussi différent que leur destinée et à travers leurs relations sociales et amoureuses, ou leurs interactions avec leur environnement et la société russe, Dostoïevski développe, quelques mois avant de mourir (fait qu'il ne pouvait guère anticiper) le thème qui lui est si cher et qu'il a déjà brillamment développé dans "Crime et châtiment" : le Mal, son origine, son existence et sa portée.
C'est l'incroyable complexité psychologique des nombreux personnages qui a d'abord fait le succès de ce roman. On a souvent dit de Dostoïevski qu'il était un auteur-psychologue et c'est vrai. Lui seul est également capable d'insérer dans un roman un manuel de sagesse et de philosophie. Profondément spirituel et religieux malgré des crises d'athéisme, Dostoïevski a toujours cherché à éclairer la pensée.
Mais que c'est long.
Ce sont justement ces développements qui ont malheureusement alourdi pour moi le fil narratif, me rendant indigestes des chapitres entiers. Commencée en février, ma lecture s'achève fin mai, me laissant la sensation d'avoir été captive d'une œuvre qui me dépassait largement jusqu'à m'oppresser.