"Trois cent mille en Californie et d'autres qui arrivent."

Steinbeck revient ici sur un épisode méconnu de l'Histoire américaine, du moins du point de vue européen. Il s'attarde notamment sur les effets de l'industrialisation, elle-même causée par les déroutes financières découlant de la crise de 29. Atemporel, le roman est une claque, de ses prémisses jusqu'à une fin aussi brutale qu'au message audacieux.
Des terres mécanisées de l'Oklahoma jusqu'à l'opulence indécente d'une Californie hostile, le lecteur suit ainsi le périple des Joad, famille de fermiers chassés de leurs terres possédées par la Banque, suite à l'arrivée des tracteurs, jugés plus rentables et moins coûteux. En parallèle, Steinbeck ouvre une parenthèse plus générale, s'évadant du simple focus pour permettre une vision globale - et dramatique - de la situation. Le capitalisme est habilement dénoncé, et au-delà, la cupidité humaine, la peur de l'étranger, pourtant concitoyen, l'envie, la jalousie, le besoin de posséder à tout prix, quitte à affamer une population condamnée à errer de propriété en propriété, en quête d'un travail ingrat et mal payé. Le message universel, véritable appel à la solidarité et à la communion, nous remet en cause, nous, individu, plonge dans l'abîme d'une pauvreté crasse mais digne jusqu'au bout, et a le mérite de s'attarder sur un épisode aussi bouleversant qu'inévitable, dans cette course au profit qui, encore aujourd'hui, est toujours d'actualité. Il faut parler de la modernité incroyable du récit, capable de mettre en valeur certains personnages féminins très forts, notamment le rôle de la mère Joad. La femme est en effet souvent décrite comme le socle indispensable de l'unité familiale, plus importante encore que les hommes dont tous dépendent pourtant, au bout du compte. Les derniers paragraphes consistent d'ailleurs en un dernier appel triomphant de la puissance et de la force de l'instinct de survie des filles d'Eve, surpassant constamment la volonté des hommes, appelée sans cesse à vaciller, voire à totalement flancher.


Le style détaillé de l'auteur guide parfaitement l'imagination à travers les paysages de l'Ouest. On se glisse immédiatement au creux des pages pour ne plus en sortir, jusqu'à la dernière ligne. Un classique à lire ou relire, incontestablement.

SerenJager
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le 19 août 2016

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Seren_Jager

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