Adorant la série Downton Abbey, j’étais excitée lorsqu'une libraire m’a proposé cette histoire d’un majordome au service d’un influent lord anglais dans les années 1930 avant de travailler pour un riche américain après la guerre. Le roman se déroule en 1956 lorsque le personnage entreprend un voyage dans le sud de l’Angleterre pour retrouver une ancienne connaissance.
Malgré cette intrigue intéressante, ce roman m'a déçu. La pensée du personnage est trop dispersée et discontinue. Le lecteur est très vite perdu au milieu d'une multitude de souvenirs incessants, certains dignes d'intérêt, mais d'autres bien trop futiles. Le voyage de 1956 n'est qu'un prétexte pour revenir sur ses années de service auprès de Lord Darlington. Le narrateur-personnage fait remarquer à quelques reprises ces ennuyeux et perpétuels retours en arrière : « Mais je vois que je m'abandonne plus qu'il ne convient à l'introspection, et qui plus est, sur un ton assez morose ». Cela ne l'empêche pas pour autant de recommencer deux pages plus loin.
Certains souvenirs sont intéressants comme sa relation avec la gouvernante Miss Kenton ou les rencontres officieuses entre figures politiques britanniques et allemandes à Darlington Hall peu avant la guerre. Mais beaucoup trop de souvenirs se concentrent sur les tâches techniques d'un majordome et sur la question de dignité. Le personnage est pour ainsi dire obsédé par le passé et par deux choses en particulier : Miss Kenton et la notion de dignité. Les longs discours sur comment les meilleurs majordomes se distinguent par leur dignité sont terriblement fastidieux.
Ce qui m'a empêché de véritablement apprécier le roman est l'antipathie pour le personnage. Que le lecteur ne s'attende pas à avoir affaire à un majordome comme Carson de Downton Abbey, très attaché aux traditions mais sympathique et drôle par sa rigidité. Ici, le personnage est attaché à ses traditions à outrance. Sa fierté et son caractère hautain sont très irritants. Le problème est que l'on ne quitte jamais le point de vue de ce narrateur-personnage, cette focalisation interne unique devient étouffante au fil des pages.
La morale de l'histoire n'arrive que trop tardivement, lorsqu'un inconnu prodigue un formidable conseil au narrateur : « Peut-être dois-je retenir son conseil de cesser de regarder autant en arrière, d'adopter un point de vue plus positif, d'essayer de faire le meilleur usage de ce qu'il me reste de jour ». Le lecteur aurait aimé que le personnage comprenne cela bien plus tôt.